Je lâche un râle de mécontentement, ne cédant pas tout de suite à la panique. J’évite de penser à cet endroit trop exigu et trop petit. J’ai du mal appuyer sur la poignée, alors je laisse passer Ye Won l’observe par-dessus son épaule et retiens une remarque. Si je l’écoute ça serait ma faute, mais je ne me souviens pas avoir refermé derrière moi. Ses tentatives sont vaine, comme les miennes, alors j’inspire lentement et me pince le nez pour réfléchir. Je n’ai pas besoin de céder à l’angoisse, j’évite de me concentrer sur ses gestes nerveux, tout comme le fait que nous pouvons vraiment être coincés. Je souffle, l’observe sans rien dire et la voit chercher quelque chose. Ah oui les téléphones ! C’est une bonne idée, du moins avant que je ne réalise « Non non non ! J’ai laissé le mien sur le plan de travail de la cuisine. » Suis-je un crétin ou quoi ? Pourquoi je ne l’ai pas mis dans ma poche. Je repose mon gâteau sur l’étagère et me tourne à nouveau sur la porte « Hey !!! Y’a quelqu’un ? On est coincé ! » C’est peine perdu, je ne suis pas idiot alors je jette un regard noir à Ye Won « Je sais tais-toi ! Ne dis pas que ça ne sert à rien. » Je l’agresse, plus qu’il ne faut mais l’endroit me parait subitement trop petit pour nous deux. Je plaque ma paume contre la porte et baisse la tête pour fixer mes pieds. Tout va bien, Kitae va remarquer mon absence et il va venir. Il ne me laissera pas toute la soirée ici coincé pas vrai ? Ce n’est qu’une mauvaise passe… j’inspire lentement, expire et tente de faire le vide. J’ai l’air d’un fou je le sais, mais je suis claustro, alors être ici me parait soudainement insurmontable. J’ai souvent fait des crises de paniques quand j’étais gamin, alors parmi toutes ces séances de psys j’ai appris des trucs pour gérer mon stresse dans ce genre de situation. La seule chose qui m’a vraiment servi durant toutes ces années. Ça ne fonctionne pas à tous les coups, mais je dois bien essayé. « Ils vont bien revenir… » une parole pour moi, alors que je tente de ne pas me laisser avoir par cette angoisse naissante. Je déglutis, relève la tête lentement et fixe Ye Won. La mâchoire serrée, je suis partagé entre le fait de m’énerver ou rire de la situation. Pasant ma langue sur mes dents, je bouge les épaules nerveusement pour faire redescendre la pression. Je ne suis pas bien, en réalité je trouve les murs très proches de nous. J’ai à peine la possibilité de reprendre une bouffée d’air. Mais je fais comme si de rien n’était et lâche « Pfff tu pouvais pas rester dans la cuisine ? Non il a fallut que tu rentres avec moi et maintenant on est coincé. » ça y’est, j’ai dit le mot qu’il ne fallait pas. Nous sommes vraiment coincés et cette idée me tord l’estomac. Je détourne les yeux, un coup de chaud me prend aux joues alors que je crie sur elle. Je raconte n’importe quoi, je sais qu’elle était là avant moi mais je suis de mauvaise foi. Il faut bien trouver un coupable et je décide que c’est elle. « A croire que tu le fais exprès pour gâcher ma soirée. » la journée avait été plutôt bonne. Je pensais qu’on passerait un bon moment tous ensembles. Mais nous voilà là, tous les deux comme des cons pris au piège. Dans un nouvel élan de panique j’attrape la poignée et force comme un dératé dessus. C’est stupide mais il faut que je sorte. 

Et voilà. Le pire des scénarios se dessine devant toi. Tu te retrouves bloquée dans un garde-manger, seule avec lui. Tu ne sais pas comment tu dois le prendre. Si tu dois en rire ou en pleurer. L’ironie du sort, quelque part, mais là, tout va trop loin. Tu l’observes parler à travers la porte alors que tu sais déjà que personne ne viendra vous ouvrir. Comme une évidence en fin de compte. Tout ça n’arrive pas par hasard, t’en es persuadée. Parce que tout va trop loin, absolument tout. Même cette porte coincée. Tu ne dis rien, hausse simplement tes épaules de plus belle. Tu te retournes, observe autour de toi. T’aimerais pouvoir trouver une solution rapidement, mais dans l’immédiat, rien ne te vient. Alors tu regardes ce qui vous entoure, en espérant trouver un objet qui pourrait vous aider à sortir de là. Rien, simplement à manger, et à boire. Un soupire qui s’échappe d’entre tes lèvres, et enfin, tu poses ton regard sur lui. Pendant un instant, tu te rends compte des efforts qu’il a fait ce soir. Lui, en costard, t’as l’impression de rêver. Tu ne l’as jamais vu dans une telle tenue, il ne ressemble en rien au Il Kyang que tu connais. Tu serais presque subjuguée, pourtant, il faut que sa voix te sorte de tes pensées, te faisant secouer la tête. Il te remet la faute dessus… vraiment ? Tu n’en crois pas tes oreilles, la stupéfaction qui se dessine sur tes traits. « Non mais t’es sérieux ? A quel moment c’est ma faute ?! T’es entré après moi j’te rappelle ! » Si ça ne tenait qu’à toi, tu aurais tout fait pour éviter de te retrouver dans une telle situation. Force est de constater que tu auras beau faire tous les efforts du monde, ce séjour n’est rien de plus qu’un cauchemar qui n’en fini pas. Tu prends une inspiration, ferme les yeux un instant. Tu tentes difficilement de remettre en ordre tes pensées, et tu te rends compte en le voyant agir comme ça que sa claustrophobie pourrait le rendre plus nerveux. Tu t’en veux, tout d’un coup, de l’engueuler à ton tour. Tu ne devrais pas, si tel est le cas. « On … On va trouver une solution. » lances-tu, presque fébrile. Tu pourrais gérer, si t’étais seule, mais avec lui, c’est différent. Alors tu prends sur toi, comme tu peux, malgré l’agacement que cette situation provoque en toi. Tu n’as pas beaucoup de place pour bouger, mais t’essaies de fouiller sur les étagères. Un peu par nervosité. Si seulement tu pouvais, tu te jetterais sur la porte pour qu’elle s’ouvre. Mais tu risques de te faire plus mal qu’autre chose, t’en es bien consciente. Il Kyang continue de s’acharner sur la poignée, et tu finis par te retourner vers lui, le regardant sans savoir comment faire. Tu restes figée, t’as peur du moindre mouvement que tu pourrais finalement faire. Tes lèvres qui se pincent, ta main qui vient dégager une mèche de cheveux de ton visage. Tu peux pas lui dire que t’as peu d’espoir de vous voir sortir de là. Alors tu cherches comment réagir, quoi lui dire, sans que rien ne te vienne à l’esprit. Complètement bloquée. « Avec un peu d’chance, l’un des gars va repasser. » Un espoir auquel tu ne crois pas vraiment. Pourtant, il va falloir t’y accrocher.

L’angoisse me prend de court, je ne pensais pas que ça arriverait aussi vite mais je me sens à l’étroit, bloqué de mes mouvements dans cet endroit. Je m’énerve contre elle, mais je sais que ce n’est pas faute. C’est la nôtre, un coup du sort peut-être je ne peux pas savoir. Mais je trouve ça une fois de plus de trop. On a déjà tellement subit ce week-end, je pensais être un peu tranquille ce soir. Je ne réponds pas à ses attaques, me rendant compte que de toute façon une nouvelle dispute ne mène à rien. Nous sommes coincés… coincés putain. J’inspire plus fort, la bouche ouverte cette fois pour laisser plus d’air rentrer dans mes poumons. Il faut que j’attire mon attention sur quelque chose qui me changera les idées. Mais seule cette porte m’obsède. Je dois trouver un moyen de sortir de là. Ye Won tente de rester calme aussi. Céder tous les deux à la panique ne nous mènera à rien. Je cherche désespérément autour de nous, mais il n’y a rien et je pousse un soupir de désespoir. « C’est foutu... on va rester là toute la nuit. » De longues heures interminables rien que tous les deux dans cet espace clos. Les murs sont trop proches, alors je fixe le plafond bêtement pour oublier quelques secondes tout ce qui m’entoure. Je contrôle tout, mes pensées, mes respirations, mes gestes. Je n’ose plus bouger de peur de me cogner dans quelque chose. J’ai surement l’air un peu idiot, je ferme les yeux lentement et passe une main sur mon visage avant de laisser s’échapper un long soupir. Tendu, je me mets à rire subitement, presque désabusé « De toute les personnes dans cette maison il faut que je sois enfermé avec toi. » oui c’est drôle, mais un peu contraignant. On se parle à peine depuis des jours, et les seules fois où on le fait c’est pour s’engueuler. Alors oui, j’en rirais presque. J’ouvre de nouveau les yeux et les baisse vers elle. Je la regarde sans rien dire, ne sachant pas quoi penser de la situation. Visiblement nous sommes vraiment pris au piège… je peux continuer à l’engueuler pour toutes ces choses qui me blessent ou alors l’ignorer ? Je ne sais pas… c’est un peu compliqué comme situation. Le pire scénario que je pouvais imaginer. Finalement, je décide de me laisser au sol pour m’assoir par terre. Ça n’arrange pas cette angoisse surtout que nous sommes presque recroquevillé sur nous-même, mais au moins j’aurais cette impression d’espace au-dessus de moi. Tant pis pour mon costard, il sera sale mais de toute façon je ne mettrais surement jamais les pieds à cette soirée. « Et dire que j’avais fait un effort pour une fois… » J’attrape un pan de ma veste regardant ma chemise blanche, ma cravate. Même les chaussures, j’avais choisis du cuir. Kitae aurait été fier de moi. Je relève la tête vers elle, nerveux à l’idée de rester ici. J’ai peur d’étouffé, dans cette pièce, mais aussi à cause de sa présence. Elle me pèse, sous le poids de nos disputes à répétitions, de toutes ces choses qui ne veulent plus rien dire entre nous. Je soupire un peu et baisse à nouveau la tête. Je n’ai pas de quoi m’occuper l’esprit, alors je viens jouer avec mes doigts. Je reste silencieux, concentré sur ces futilités pour calmer ma nervosité. 

Tu tentes de rester calme, c’est la meilleure chose à faire. Après tout, vous avez réussi à passer la journée sans dispute - ou presque. Alors même si la situation ne s’y prête pas, tu te sens encore capable de faire un effort. Pas seulement pour lui, mais pour ton propre bien-être. Ces conversations houleuses laissent un encore un goût amer, tu ne pourras pas le changer. Mais tu ne pourras pas dire que tu n’as pas essayé. Tu restes de marbre, finalement. Tu comprends bien vite que vous ne sortirez pas de là de si-tôt. Sauf un coup de chance, mais il faut dire que vous n’en avez pas vraiment eu depuis votre arrivée. Alors pourquoi maintenant ? T’évites de le dire, d’y penser, alors que tu peux le voir paniquer dans cet espace réduit. Ca n’arrangera pas les choses si tu t’énerves. Tu préfères garder un semblant de calme, c’est sûrement plus simple comme ça. Ca n’enlèvera pas la tension qu’il peut y avoir entre vous, mais qui sait, ça pourra empêcher qu’une nouvelle dispute éclate. C’est le seul espoir que tu as, à cet instant précis. Tu laisses tes mains glisser dans les poches de ton manteau, joue nerveusement avec le tissus, et t’arrêtes d’un seul coup quand tu l’entends rire. Un sourcil arqué, t’aimerais répondre à cette nouvelle sorte d’attaque, mais ne dit rien. Ne pas envenimer la situation. Une phrase qui tourne en boucle dans ton esprit. Tu ne sais plus quoi faire, n’ayant jamais pensé pouvoir te retrouver dans cette situation. C’est difficile. Tu te demandes alors si tu vas réussir à tenir, ou si vous allez vous ignorer. Encore pire, t’as peur que vous vous engueuliez une fois de plus. Parce que cette fois, tu n’as pas de porte de sortie. Tu soupires à ton tour, désabusée. Ton attention reste malgré tout posée sur lui lorsqu’il s’assoit. Tu te baisses à sa hauteur, dans un sens, t’es tout aussi inquiète pour lui. Tu sais qu’il n’aime pas les endroits fermés. Alors même si tu te sens prise au piège, tu te doutes que c’est encore moins évident pour lui. Sa remarque te fait esquisser un sourire, que tu n’arrives pas à contrôler. Tu laisses même échapper un simple « ça, c’est sûr… », faible, mais pourtant assez audible pour qu’il l’entende. Tu te surprends toi-même, te relève d’un seul coup, lui tourne le dos pour ne pas avoir à supporter son regard. Ce n'est pas un reproche, mais une constatation. Malgré toute la colère que t'as envers lui, tu le trouves encore plus beau ce soir. Tout est confus, encore une fois. D’un seul coup, les gâteaux posés sur l’étagère ont l’air bien plus intéressants. Tes mains à nouveau glissées dans tes poches, tu restes sans bouger, droite sur tes jambes. Ta tête se baisse un instant. Quelques secondes de silence, avant que ta voix ne viennent le brise. « Pourquoi … ? » un simple mot, une question que tu te poses à toi-même, qui s’échappe pourtant d’entre tes lèvres. Pourquoi le sort s’acharne sur vous comme ça ? Pourquoi, à chaque fois que tu essaies de t’éloigner de lui, le monde s’obstine à ce qu’il soit toujours plus proche de toi ? Des questions qui ne trouveront certainement jamais de réponse, mais qui restent là, quelque part. Qui tambourinent dans ton esprit sans vouloir en sortir.

Sa voix s’élève doucement, presque inaudible et pourtant j’entends sa remarque. Un petit sourire au coin de mes lèvres alors qu’elle se relève subitement. Je l’observe, sans rien dire, gêné mais à la fois flattée par ses mots. Ça ne sonne pas comme un reproche cette fois, dans une autre circonstance je l’aurais remercié, au lieu de ça je ne détache pas mon regard d’elle. Je me sens perdu, réalisant peu à peu que nous allons passer la soirée tous les deux. J’avais prévu de rester avec les autres ce soir, de profiter et même peut-être danser, moi qui ne fais jamais cet effort. Je comptais profiter, me laisser aller à ne plus rien penser. Au lieu de ça, je suis piégé mais pas tout à fait accablé par ce mal-être qui ne me quitte plus depuis des jours. L’angoisse d’être ici finalement me change l’esprit. Bien que si je m’y risque à y penser trop souvent, je paniquerais complètement. Mais ça n’envahi pas toute ma tête, une part de moi se concentre sur elle aussi… sa silhouette parfaite cachée par son long manteau. Dans une autre situation, j’aurais trouvé le courage de lui dire à quel point elle m’attire. Dans une autre vie, j’aurais succombé. Mais dans celle-ci, je me contente de la regarder sans pouvoir toucher. Je détourne le regard, retiens un soupir et pose ma tête contre l’étagère derrière moi. Un nouveau silence envahi la pièce, alors je me concentre sur un paquet de gâteau en face de moi. Je n’y comprends rien, tout est inscrit en japonais mais j’aime repenser à ces quelques notions que je connais. Essayant de déchiffrer une syllabe, elle trouble mon exercice avec une question. « Pourquoi ? » je me redresse lentement, la regardant toujours de dos. Que veut-elle dire par là ? Pourquoi sommes-nous coincés ici ou pourquoi nous en sommes arrivés là ? Je ne sais pas, j’ai le cœur lourd soudainement. Rattrapé par toutes ces choses qui me hantent. Des questions j’en ai des tas à posés aussi. Mais puis-je m’y risquer sans avoir peur que tout dérape ? Je ne sais pas, je me perds dans toutes mes interrogations comme elle doit se perdre dans les siennes. Alors finalement je finis par dire « Pourquoi quoi Ye Won ? ». J’ose lui demander, même si j’ai peur de la suite. Peur de ce qu’elle peut dire. C’est peut-être encore un moyen de se détester plus. Ne plus savoir comment se parler ni… se supporter. Je laisse à nouveau ma tête rencontrer l’étagère, m’appuyant dessus je l’observe « Pourquoi t’es là coincée avec moi ? Ou pourquoi on se détruit ? » Autant brisé la glace maintenant. Si elle veut parler, on peut le faire, si elle décide de se braquer alors très bien. J’accepterais, mais j’ai cet espoir soudain qu’enfin on pourrait mettre les choses aux claires. Je prends cette opportunité sans mesurer ce que je fais. C’est peut-être une erreur de ma part, un mot maladroit encore une fois, mais j’ose… « Dis-moi le fond de ta pensée… » Je suis presque las en lui demandant ça. Parce-que je ne la comprends plus. Je suis incapable de lire en elle comme je savais le faire avant. Un regard suffisait à ce qu’on se comprenne, qu’on soit complice. Mais maintenant, ce fossé n’a cessé de s’agrandir entre nous. 

Pourquoi… Un seul mot pour résumer toutes ces questions qui continuent de parvenir à ton esprit. Certaines qui restent ancrées là, depuis si longtemps déjà. D’autres qui apparaissent, à des moments comme celui-là. Qui s’effaceront une fois l’instant effacé. Mais encore et toujours des interrogations, sur lui, sur vous. Sur ce qui vous amène à vous détruire autant. Sur l’univers entier qui s’acharne sur cette relation vouée à l’échec depuis si longtemps. Sur tes sentiments aussi, plus forts qu’avant. Malgré toute cette colère qui gronde encore en toi. Cette question lancée comme une bouteille à la mer. Qui a si peu de chances de trouver des réponses. Pourtant, elle est posée. Et tu le regretterais presque, alors que vous êtes désormais coincés. Il n’y a plus d’échappatoire, plus d’issue de sortie. Et si tu te risques à cette discussion, t’as peur du résultat. Alors, tu ne réponds pas à sa première questions, ton regard rivé sur le sol. Ta tête qui se secoue légèrement, espérant comme à chaque fois que ça t’aide à laisser s’envoler tout ça. Peine perdue, alors qu’il te relance. Tu te mors l’intérieur de la joue, un court instant. Restant dos à lui, tu tournes malgré tout la tête en sa direction. « Pourquoi on s’détruit ? Ca c’est une bonne question. » que tu lâches, presque froidement. Tu lui en veux encore, de tout ce qu’il s’est passé ces derniers jours, mais pas seulement. Depuis combien de temps il te ment ? Tu te le demandes, alors que tu te souviens de cette fameuse soirée, où tu l’as découvert sous un nouveau jour. Dealer de crimson. T’auras tout vu venant de lui. Pourtant, ça n’empêche pas ton coeur de l’aimer encore. Bien plus qu’avant. Voilà qu’il veut découvrir le fond de ta pensée, et pendant quelques secondes, tu te demandes s’il est temps de crever l’abcès. Après tout, vous êtes bloqués, pas prêts de sortir de là. Alors tu te retournes, tes mains passent sur ton visage, puis se posent sur tes hanches. Trois pas en avant, tu fais demi-tour, pour faire à nouveau trois pas en avant. Et tu recommences. Deux, trois fois. « Tu veux vraiment connaître le fond d’ma pensée ? » Tu souffles, continue de marcher, comme tu peux, malgré le peu d’espace devant toi. Tu serais prête à attraper cette bouteille de champagne, la boire cul sec pour trouver ce courage dont tu manques tant. Mais ce n’est pas une bonne idée, tu le sais. Alors tu rassembles tes esprits, une minute tout au plus. « Je … Je sais plus Il Kyang. J’te comprend plus. Tu disparais, reviens dans ma vie. Tu m’donnes des espoirs, j’me rend compte que j’me plante. Et là… » Un rire désabusé qui te prend, nerveusement. « Tu t’envoies en l’air avec cette blondasse pour après me faire une scène. J’comprend vraiment pas. » Tout est confus, même tes paroles semblent l’être. Tes talons continuent de claquer sur le sol, lentement, alors que t’as besoin de bouger, de prendre l’air. Marcher te ferais le plus grand bien, mais tu n’en as pas la possibilité. « Alors ouais, j’me demande pourquoi on en arrive là. Pourquoi on s’retrouve coincés dans ce putain d’garde-manger alors que ni l’un ni l’autre ne peut plus se supporter. » Tu te mords la lèvres, ton regard qui contemple le plafond. « C’est ridicule… » Ca résumerait parfaitement la situation, finalement. Là ou vous en êtes. Une relation qui n’a plus aucun sens, qui ne rime plus à rien. Et pourtant, vous êtes encore là. Trop proches l’un de l’autre, à tel point que t’as l’impression que la pièce entière baigne dans le parfum de sa peau. Une odeur que t’aurais voulu oublier, mais qui chatouille encore tes narines, fait battre un peu plus rapidement ton coeur. Coincée, dans tous les sens du terme, voilà où tu en es.

C’est trop tard, j’ai posé la question, celle qui allait peut-être tout changé et tout bouleversé. J’ai peur de ce qui va arriver, peur de ce qu’elle pourra dire. Je la sens désabusée, frustrée et si en colère. Je suis autant perdu que toi Ye Won et je trouve que ce petit jeu a assez duré. Nous étions bien avant, avant cette soirée avec lui… je pensais qu’on serait assez fort pour en discuter, pour passer au-dessus mais rien. Je l’observe, elle me rend nerveuse, alors je tente de garder la tête froide. J’ai besoin de lui parler, tout comme j’ai besoin de l’écouter aussi. Pourtant ses mots me blessent, une fois de plus c’est toujours plus dur à entendre que de les imaginer. Je baisse les yeux, coupable évidement de ne pas avoir nié cette histoire saugrenue. Mais par-dessus tout je suis vexé… je reste concentré sur mes doigts, je ne veux pas m’emballer tout de suite, moi qui ait si peur de lui dire ce que je ressens. L’atmosphère se charge, une nouvelle fois cette tension s’immisce entre nous. Mais il est temps de crever l’abcès. Je veux arrêter ces non-dits qui nous détruisent encore. Je laisse échapper un soupir d’entre mes lèvres. Blessé, je tente de garder l’esprit clair sans m’agacer rapidement… « Je sais que tu me fais plus confiance. Tout a dérapé à la soirée avec Young Min… » Dire son nom m’irrite. J’ai encore tellement de rancœur contre lui. Même si il n’est pas responsable des choix que j’ai faits. J’hausse le ton « Putain Ye Won ! Je t’ai pas menti, je suis plus un toxico. La crimson c’est… c’est rien. Oui, j’en aie prit mais regarde-moi, est-ce que j’ai l’air d’être accro ? Je m’en fous, j’en prends même plus. Pour moi c’est de la merde ces trucs-là. Et tu sais mieux que personne dans quel état j’étais capable de me mettre pour un dose de coc’. » Alors arrête de me juger, arrête de croire toutes ces conneries. Je n’ai aucune excuse pour avoir pris ces merdes je le sais mais j’ai fait une erreur… une de plus parmi toutes celles que j’ai déjà faites avant. « Je n’aurais pas dut, je le sais. Mais c’était juste un moyen comme un autre de tenir avec mes études et mes heures supp à la con. J’avais besoin de tune pour ma famille. C’est tout ! » Est-ce possible de résumer ça en quelques mots ? Est-ce une raison suffisante pour qu’elle me pardonne ? Je n’en sais rien, je relève les yeux vers elle « Et je n’ai jamais dealé. Je voulais juste être là pour Young Min… » Car au fond je l’aimais bien ce type. J’avais finis par le considérer comme un ami. Ma voix est plus lasse, mon ton moins dur. Je regarde devant moi « Tu sais ce qui me fais le plus mal… c’est que tu me crois capables de toutes ces horreurs. » et c’est normal, parce-que je lui ai donné raison. Je n’ai jamais nié, je n’ai pas su assumer ce que je ressentais. Je me suis cloitré dans mon silence, dans ces mensonges pour mieux me protéger. Au final, ça n’a servi à rien… « T’oses me dire que c’est moi qui me moque de toi. Mais celle qui joue c’est toi… t’assumes pas le fait qu’on est couché ensembles. Pourquoi ?! Hein ? Parce-que t’as peur que je joue sur plusieurs tableaux ? Parce-que tu me crois capable de coucher avec toutes les filles que je croise. Que t’es une parmi tant d’autres ?! C’est pas Katarina le problème, c’est toi ! » Cette fois-ci je m’agace. Parce-que le vrai problème est là. Cette soirée qui m’a brisée, celle où elle m’a abandonné … « J’avais besoin de toi Ye Won ! Mais t’as préféré partir comme une voleuse et me laisser tomber. » Je n’ose pas tout lui dire, parce-que j’ai peur. « Tu crois que c’est facile d’apprendre que j’ai un jumeau ? Que j’ai passé toutes ces années dans le mensonge ? Non ! Alors j’avais pas vraiment pas besoin que tu foutes plus la merde dans ma vie. » 

Les mots que tu oses enfin prononcer sont difficiles, mais surtout nécessaires. A être cloîtrés dans le silence trop longtemps, vous vous détruisez de plus en plus, et tu le sais. Chacun a sa part de responsabilité, certainement. Chacun de vous a commis des fautes et s’en mord les doigts, mais ne comprend pas les réactions de l’autre. Il est là le problème, finalement. Tu sais qu’il a raison lorsqu’il te dit que tout a commencé à s’effilocher après cette soirée avec Young Min. T’as découvert une autre facette de lui, qu’il n’a pas voulu démentir. Peut-être que tes mots étaient bien loin de la vérité ce soir-là, mais lui n’est pas venu pour te dire la vérité. Celle qu’il tente désormais de t’avouer. Tu ne sais pas vraiment si t’es en mesure de le croire, de l’accepter. A ces paroles, des souvenirs douloureux qui reviennent. Toutes ces soirées ou Kitae t’appelait, paniqué, pour que tu viennes l’aider à t’occuper de lui. Toutes ces fois ou t’as été là pour lui, avec pour simple remerciement son départ. Sans un mot, sans une explication. « Je te crois capable de ça ? Mais tu m’as laissé toutes les raisons d’y croire Il Kyang ! A quel moment t’es venu me dire que j’me trompais ? A quel moment t’as eu le courage de venir m’en parler ? » Tu n’étais peut-être pas en état pour entendre ça, mais vous n’en seriez pas là non plus, finalement. C’est ce que t’essaies de te dire. T’aurais plus facilement fermé les yeux sur cette soirée s’il avait eu le courage de tout t’avouer avant. Et voilà qu’il reparle de cette nuit, celle ou t’as succombé face à sa détresse. Parce qu’elle faisait écho à la tienne, quelque part. Tu n’oses plus le regarder. T’aurais voulu garder un doux souvenir de cette nuit-là, mais cette fois, c’est toi qui a tout gâché. Tu tournes en rond, n’arrive plus à savoir ce que tu ressens. T’es prête à exploser, à tout envoyer balader. Mais tu te contiens, comme tu peux. « J’ai pas voulu te laisser tomber ! C’est ça que tu comprends pas ! » Parce que tu ne l’expliques pas. Parce que toi aussi, t’as préféré te murer dans ton silence, quand t’as compris qu’il t’évitait de nouveau. « Alors oui, ce matin-là, j’suis partie. J’avais besoin d’réfléchir à tout ça. Mais c’est pas moi qui m’suis jetée dans tes bras la première. J’ai juste été faible, parce que j’avais aussi besoin que tu sois là. » T’as voulu te persuader qu’il avait profité d’un moment de faiblesse, même si, encore aujourd’hui, ça sonne terriblement faux. « J’avais besoin d’temps pour accepter ça. J’avais… J’étais même pas sûre de pouvoir te soutenir, pas avec c’que j’étais moi aussi en train d’vivre ! » Tes mains qui passent sur ton visage une fois de plus. Tu ne sais plus ce qui serait bon à dire ou pas. « J’étais prête à tourner la page, mais après ça, c’est toi qui m’évitait, qu’est-ce que tu voulais que j’fasse ? » Tes mains qui claquent sur tes cuisses dans un geste d’incompréhension. On peut lire sur ton visage toute la frustration retenue ces derniers jours, toute cette colère, toutes ces choses qui restent encore coincées au fond de toi. « Mais c’est bon, toi t’as tourné la page avec ta Katarina. Alors oui, c’est un problème, parce que ça non plus, j’arrive pas à l’gérer ! » Son regard posé sur toi devient insurmontable, alors tu lui tournes le dos, croise tes bras sur ta poitrine. Comment lui dire, comment lui faire comprendre, que t’arrives pas à l’oublier. Qu’importe toutes ces histoires, c’est encore et toujours lui que tu désires. Sans réussir à l’accepter totalement. Parce que t’as été brisée trop de fois, et que la confiance que t’as su lui accorder la première fois ne sera jamais plus la même. La peur omniprésente qu’il disparaisse à nouveau, finalement.

J’ai peur de tourner la page, peur que cette vérité nous brise. Une part de moi y voit de l’espoir, l’autre une fin. Alors ça tourne, ça devient insupportable, un peu plus à chaque seconde. Elle a raison, je n’ai pas osé venir la voir, lui dire que je regrettais. Que tout ça c’était faux, même si il y avait une part de vrai je l’admets. Mais au final, le temps nous a pris de court. Effrayé, je suis resté muré dans un silence. Puis il y a eu cet accident, il n’y a plus eut aucun bon moment pour en discuter. J’ai laissé faire le temps, les minutes nous abîmer… Ye Won, tu n’as toujours pas comprit alors ? Je suis un lâche, depuis des années je me cache derrière des sourires, des plaisanteries, une légèreté mal placée. C’était ça ma force, toujours avancer, sans jamais se poser la moindre question. C’est un manque de courage au final… Je ne la lâche pas des yeux cette fois, accaparé par ses explications. Mais ma tête tourne, mon cœur vrille. Je ne comprends pas, c’est si flou pour moi. « Faible ? Alors c’est juste ça pour toi, une faiblesse d’un soir ? » Parce-que si ce n’est pas ça alors c’est quoi ? Ses propos me surprennent, je suis encore plus confus. Je reste silencieux, quelques secondes avant de finir par me lever. Je n’en peux plus de cette histoire ! Il faut qu’elle arrête. Alors dans un geste mesuré, je l’oblige à me faire face « Ye Won regarde-moi putain. Est-ce que tu crois vraiment ce que tu dis ? » Mon regard rivé dans le sien, je refuse qu’elle détourne les yeux, alors j’attrape son visage, la forçant à me regarder. « Je n’ai pas couché avec Katarina. Jamais ! » Même si elle n’était pas là, je n’aurais jamais céder. C’est elle que je veux, aucune autre. « Tu me crois pas, je le sais mais bordel regarde-moi dans les yeux. Je peux pas te faire ça ! Pas après… » Je m’arrête, hésitant à dire ce que j’ai sur le cœur. Parce-que j’ai peur de parler de quelque chose dont elle ne se souvient pas. Peur qu’elle ait oublié cet instant qui comptait pour moi. « Pas après avoir passé deux nuits avec toi… » Je me détache d’elle, détournant les yeux. « Tu t’en souviens pas… » Tout comme elle doit avoir oublié ce que je lui ai dit. Pourtant, ça avait de l’importance à mes yeux. Mais je mentirais en disant que je ne savais pas ce que je faisais. Je savais très bien qu’elle était trop ivre pour se souvenir de tout, encore plus des mots que j’ai eus ce soir-là. Je me suis caché derrière ça, de peur qu’elle ne découvre les sentiments que j’ai pour elle. « C’est Jae qui a pris ma chambre ce soir-là. J’ai récupéré la sienne depuis le premier soir. Mais t’es trop bornée pour t’en rendre compte. » Non, on est juste trop con, à passer notre temps à s’éviter. Je lâche un soupir « Si c’était qu’une nuit de faiblesse pour toi alors très bien. Mais moi je ne regrette rien de ce qui s’est passé Ye Won. Je… » putain, dis-lui ça réglera tellement de choses. Mais je n’y arrive pas, ça m’effraie tellement. Alors je détourne les yeux « Je suis prêt à assumer mes erreurs et ces nuits avec toi n’en étaient pas… » je m’approche à nouveau d’elle, le regard plus brillant « Je t’en supplie me dit pas que tout ça ne comptait pas… parce-que j’en crèverais… » et je serre les dents, effrayé par la réponse qu’elle seule connait.

Tu n’arrives pas à savoir ou cette conversation va vous mener. Si les mots seront assez forts pour tout oublier. Si les paroles sont réelles, ou si elles ne sont qu’une illusion de plus dans cette vie qui s’acharne tant sur toi. T’as peur de ce que tu pourrais dire, de ne pas être capable de t’exprimer correctement. Pourtant, tout ce qui s’échappe de tes lèvres n’est qu’une vérité que t’as trop longtemps mis de côté. Tout ça pour que ce qui vous liait ne parte en fumée. T’es perdue dans cette tourmente, sans aucun moyen de t’échapper. Cette fois, il faudra avoir le courage de tout affronter. Tu ne sais pas si tu en es capable, si t’arriveras à tenir le coup. Sa question n’est une plainte de plus à laquelle tu ne saurais pas répondre. Même lorsqu’il attrape ton bras pour que tu te retournes, tu gardes ta tête baissée, interdite. Tes lèvres que tu mords pour ne pas sombrer. Ses mains sur ton visage deviennent une torture, alors que ton regard se pose finalement sur lui. Tes yeux s’écarquillent sous la surprise, alors qu’il se détache de toi. Ton corps faiblit, alors que tu finis pas t’appuyer sur les étagères derrière toi. Tu fermes les yeux, un instant. Empêchant ces larmes de se mettre à couler. Tu voudrais répondre mais tu n’y arrives pas. Bloquée dans ces langues qui se délient, dans ces mensonges qui s’évaporent, dans lesquels vous vous complaisiez  encore quelques minutes en arrière. T’as besoin de reprendre tes esprits, un instant. Tu ne sais plus ou te mettre, tu n’as aucun endroit pour ta cacher. « Bien sûr que ça comptait… » que tu souffles, difficilement. Pourtant, toute cette rancoeur reste ancrée en toi. Ces blessures qui ne s’effacent pas, qui se ravivent même lorsqu’il n’est pas là. Cette perle d’eau qui glisse sur ta joue, que t’essuies d’un geste rapide, relevant ton regard vers le plafond, de nombreuses secondes. « J’avais peur. Peur que tu t’barres une fois de plus. » finis-tu par ajouter, ton coeur palpitant dans ta poitrine face à cet aveu que tu lui fait. Tu l’aurais pas supporté. Et quelque part, même si tout est allé trop vite, c’était plus simple comme ça. Lentement, tu te glisses sur le sol, t’asseyant par terre. Tu n’arrives pas à affronter son regard, tu n’es même plus sûre de comprendre ce qu’il se passe exactement. Tes jambes pliées contre toi, tu laisses ta tête retomber dans tes mains. « C’est trop dur Il Kyang… » Dur de ne pas succomber face à lui. Compliqué de te laisser aller, alors que cette peur reste omniprésente. Et t’as beau être prête, au fond de toi, à lui pardonner cet abandon, tu ne crains qu’une chose, qu’il recommence. Qu’il brise un peu plus ton coeur s’il venait à s’échapper de nouveau. Mais avouer ce que tu ressens exactement au fond de toi est encore plus difficile à admettre, à exprimer à voix haute. T’as besoin de lui, malgré tout ce qu’il s’est passé. T’as besoin de sa présence à ses côtés, de sa douceur, des regards qu’il te porte, qui te font te sentir unique. « Je sais plus quoi faire… Même avec tout ça, j’arrive même pas à t’détester… » Tu retiens ces sanglots, tente de rester forte une fois de plus, mais tu n’y arrives plus. « J’ai .. J’ai juste peur, et j’arrive pas à l’gérer. »