Aller voir ce qu’elle pensait avoir aperçu ? De toute façon avaient-ils une autre piste à suivre au milieu de ce grand rien compensé uniquement de sable, de vent et du ciel où brillait un soleil de plomb ? Ils gravirent la dune. La renarde apaisa ses queues afin d’avancer discrète, tapie si près du sol brûlant. Pauvres de leurs coussinets… Et pourquoi devait-elle subir aussi toutes ses épreuves ? Après tout, c’était lui qui avait envoyé les gumiho dans les tréfonds de l’enfer ? C’était pas juste ! Mais si elle voulait sauver les siens, elle n’avait pas d’autres choix… Arrivé au sommet de la dune, Se Yun partit devant en dévalant la pente pour se retrouver nez à nez avec un surprenant scorpion. Quoique, après tout ce qu’ils avaient déjà vu, celui-ci semblait limite normal. La renarde les rejoint sur les freins dans la descente, ne sachant à distance si son partenaire était en mauvaise posture face à la redoutable créature. À leur hauteur, elle comprit que non. Le scorpion capé n’était qu’un messager de plus. Une grotte ? Quelle grotte ? Hera regarda autour d’eux, ne voyant qu’encore et toujours du sable et du sable… Elle ne savait pas à quelle drogue ils carburaient tous dans cet univers mais c’était violent !

Après sa prise de parole trouble, le scorpion se tourna plus précisément vers la renarde qu’il observa. Sa queue mortelle se dressa et sembla s’abattre soudainement sur elle avant de s’arrêter juste devant le bout de son museau. À la pointe de la queue du scorpion était un petit ornement traditionnel en forme de papillon.
« L’un des miens m’a demandé de remettre ceci à la renarde au coeur éperdu. »
Un scorpion ? Ce symbole ? Serait-ce… Instinctivement, Hera la patte pour recevoir ce présent. Lorsqu’il entra en contact avec la renarde l’ornement devint réel. Petit papillon virevoltant s’envola.
« Viens ! Suivons-le ! Il va nous montrer le chemin ! »
Et la renarde se hâta de le suivre par-delà la dune devant eux de l’autre côté de laquelle le papillon plongea dans un monticule de sable qui se transforma en une immense grotte de sable en forme de Scorpion, gueule ouverte. Hera continua jusqu’à l’entrée devant laquelle elle s’arrêta, se tournant vers son partenaire.
« Ça ne peut pas être pire qu’à l’intérieur du requin, non ? »
Mais pouvaient-ils vraiment y rentrer ? Etait-ce un piège ? La caverne se mit soudainement à parler.
« Qui donc vient troubler mon repos ? »
Surprise, elle fit un bond en arrière avant de reprendre la confiance sur ses quatre pattes.
« Nous sommes les envoyés de l’empereur… Ou d’un scorpion… Enfin, bref, le papillon nous a guidé jusqu’ici. 
– Vous vous apprêtez à pénétrer dans un territoire secret, entrez si vous l’osez… »
Hera tourna la tête vers Se Yun et lui adressa un hochement assuré. Elle était confiante. Ce papillon représentait un message qui lui était adressé. Elle savait inviter à rentrer. Lui par contre, elle n’en avait aucune certitude mais puisqu’ils devaient tout accomplir à deux. Les renards s’aventurèrent donc à l’intérieur de la bête.

Il ne comprit pas vraiment la scène qui se déroula sous ses yeux. Il semblait se passer quelque chose entre la jeune renarde et le scorpion (il s’imagina le mélange des deux animaux, et il fit une grimace de dégoût) mais il n’arrivait pas à identifier ce que cela pouvait être. Il y avait une sorte de papillon, qui d’un coup s’anima lorsqu’elle le toucha… attendez… c’était elle, alors, le cœur pur ? Ah ! L’outrage ! Elle n’avait strictement rien de pur, s’insurgea intérieurement Se Yun, n’osant pas réellement affirmer son outrage face au scorpion qui, d’un coup de dard, pouvait l’achever. Rechignant, il se mit à suivre le papillon avant de le perdre de vu, marmonnant entre ses moustaches des sortes d’insultes et des plaintes de jalousie. Il aurait aimé, lui, être le cœur pur. Il était sûr qu’il était certainement plus sympa que la jeune femme. Bien vite, ils se retrouvèrent face à une grotte qui faisait peine à voir. Elle était en sable (ils manquaient surement de budget), et représentait un animal, il l’avouait, qu’il trouvait peu à son goût. Il acquiesça à la remarque qu’elle fit, haussant ses épaules animales. Il la laissa répondre à la voix (d’où pouvait-elle bien venir ?), puis, sans attendre, ils se lancèrent dans la grotte avec confiance.

Il avait sa tête bien haute, et observait droit devant lui en essayant de deviner ce qui pourrait bien leur arriver. Mais, après seulement quelques pas à l’intérieur, tout autour d’eux se mit à trembler. Il vit les parois à côté de lui perdre des grains de sables, il voyait le plafond au-dessus d’eux se désintégrer, et il entendait surtout un grondement qui semblait venir directement de l’intérieur de sa tête tant il était fort et tant il était près. Il se mit à courir, le plus vite qu’il put pour s’éloigner de l’entrer qu’il voyait déjà se refermer sur eux. « putain, l’horreur ! c’est encore de ta faute ça, j’en suis certain ! je vais me faire bouffer par du sable, vraiment pas hâte » Ils se firent emporter par une vague de sable qui les amena plus profondément dans la grotte contre leur gré, et se retrouvèrent dans une salle de sable au haut plafond. Il y avait des bijoux partout, des diamants, de l’or, des rubis et des saphirs. Il y avait des meubles d’une folle richesse, des merveilles du monde, certaines plus vieilles que d’autres. Il avait l’impression d’être entré dans une autre époque. « qu’est-ce que c’est que ça ? qu’est-ce qu’on est sensé faire ici ? » Rien n’indiquait quelle était leur mission, personne ne leur avait rien dit, ou alors il n’avait simplement rien compris. Il avait espéré en entrant trouver un mot qui leur dirait quoi faire, mais rien.

Il s’approcha d’un cendrier doré qui l’intrigua, il passa la main au-dessus, et les murs tremblèrent. Il s’éloigna. Il recommença, et à cet instant, une voix se fit entendre. « azy là, connard, joue pas avec le feu, kestu fait, t’as cru tu pouvais toucher des objets comme ça la ? non. tu vas au fond de la grotte, c’est tout, j’te préviens, tu touches à quoi que ce soit t’es mort keskia » Il haussa haut ses sourcils de renard, surpris par la voix très étrange qui parvint à ses oreilles. Elle semblait si peu menançant qu’il recommença le même manège plusieurs fois, souriant comme un gamin. « oh bâtard arrête il va t’arriver des malheurs » recommença la voix, et il ne s’empêcha cette fois-ci pas de rire. « oh, qu’est ce que tu penses pouvoir me faire ? » demanda Se Yun, toujours bien amusé. Puis, une cascade de sable venu du plafond s’abattit sur sa tête et l’ensevelit, et un rire raisonna. Il sortit tant bien que mal de la petite dune, et se tourna vers Hera. « bon, il a dit l’autre qu’il fallait aller tout au fond, et qu’il fallait toucher à rien, apparemment. » Il ne cachait pas qu’il était soulé par ça. Il venait de se faire agresser par quelqu’un qui ne semblait même pas exister.

Les emmerdes ne cessaient donc jamais ? Ça devenait franchement pénible tout ce bordel ! Ils ne savaient même pas où ils allaient, ce qu’ils devaient accomplir ou seulement de manière très obscure. Depuis le début, ils avançaient à l’aveugle et ils manquaient régulièrement d’y laisser leur peau ! V’là que maintenant la caverne dans laquelle on les avait envoyé s’effondrait ! Instinctivement, la renarde hâta le pas vers les profondeurs de la caverne. Comme si elle n’était pas déjà assez de mauvais poils, Se Yun rejette toute la responsabilité sur elle !
« Oh ! Ta gueule ! lacha-t-elle spontanément. L’assassin au coeur en putréfaction ce n’est pas moi ! »
Et elle le laissa courir en tête, sans se presser finalement. Bien que courant mais tranquillement, la gumiho se protégea de l’éboulement de sable grâce aux pouvoirs de ses quatre queues récupérées. Si elle en avait eu neuf, assurément aurait-t-elle pu repousser la totalité de sable et conserver l’ouverture de la grotte. Malheureusement, ce n’était pas le cas et elle dû se contenter de sa puissance actuelle. Une fois sains et saufs mais semblerait-il prisonniers de la caverne, la tête haute et le port noble, la renarde toisa son partenaire qui avait bêtement couru à en perdre haleine :
« Bouffon ! »
Hera ne lui accorda pas plus longtemps son attention, observant l’intérieur de la grotte remplie de trésor. De son museau remonté, elle huma l’air. Ça sentait le piège à pleine truffe ! Qui disait trésor disait toujours ennuis ! Se Yun demanda ce qu’ils étaient censés faire et Hera n’en avait pas la moindre idée. Néanmoins, elle se doutait un peu de ce qu’ils ne devraient certainement PAS faire :
« Dans ce genre de situation, souvent la première règle est de ne toucher à ri… »
Et bien sûr, quand elle se tourna vers lui qu’est-ce que le renard s’apprêtait à faire ? Heureusement (ou pas ?) une voix sortie de nulle part l’interrompit. Un soulagement, bref, car la voix avait beau ne pas être particulièrement féminine, Se Yun ne sembla pas décidé à l’écouter et jouer la provoque. Cette foutue aventure n’était donc pas déjà assez merdique comme ça ?
« IL T’A DIT DE NE PAS TOUCHER ! »
La voix mystérieuse se chargea de le remettre à sa place à l’aide d’une bonne douche de sable.
« Bien fait ! » railla la renarde, acide.
Comme si elle n’avait pas entendu et assisté à la scène, Se Yun fit celui qui lui expliquait les consignes de la mission. Non mais il la prenait vraiment pour une conne ? À moins que ce soit juste lui qu’il soit trop con ?
« Non, sans blague ? »
Pour la cohésion, ils étaient peut-être presque à mi parcours de leur mésaventure mais ce n’était pas encore ça.

Les deux renards s’enfoncèrent donc dans le large couloir de la grotte bordé de trésors scintillants, rares, de tous temps et de toutes cultures. Les sens aux aguets, Hera continuait de tout observer du coin de l’oeil. Ses moustaches frémissaient. Ses oreilles s’agitaient dans tous les sens, captant le moindre son.
« On dirait que ça grouille dans les parois… » murmura-t-elle.
Comme s’ils étaient dans une fourmilière avec d’innombrables galeries secrètes à travers les murs. Cependant, dans le désert, elle doutait qu’il ne s’agisse que de fourmis. Ses poils se dressa légèrement sur son dos. Vers quel danger allaient-ils encore ? Soudain, elle vit une ombre se mouvoir dans l’obscurité.
« Tu as vu ? » demanda-t-elle à son partenaire.
Puis, l’ombre sembla passer au-dessus de leur tête. À droite. Non, à gauche. Derrière ? Juste devant eux, un tapis apparu sur ses deux… froufrous ? Et se mit à danser le Gangnam Style. Hera écarquilla les yeux. Elle inspira fortement, instinctivement avant de plaquer ses deux pattes avant sur sa truffe. Il y aurait-il des gaz hallucinogènes flottant dans l’air de cette caverne ? Sa tête se tourna vers son partenaire. Était-il aussi décontenancé qu’elle ou dansait-il en miroir avec le tapis magique ? Avec lui, tout était possible…

Il se sortit difficilement de sa petite dune de sable personnelle, grimpant comme on escaladerait une montagne pour venir chercher de l’air, et, une fois la dernière patte sortie, il secoua son poil avec énergie dans l’espoir d’en faire sortir le moindre grain. Il avait créé toute une sphère de sable autour de lui qui en quelques secondes à peine disparut sur le sol, se mélangeant à tous ceux qui avaient déjà été là auparavant. Puis, il bouda. Il était mécontent de s’être fait ainsi réprimander, et n’aimait pas l’autorité dont cette voix dans les airs et Hera faisaient preuve. Il tourna la tête sur le côté, son museau bien haut comme pour les défier tous les deux. Il suivit tout de même la renarde, réticent. Il restait aux aguets, tous ses sens alertes. Il n’avait pas envie de se retrouver face à une nouvelle mauvaise surprise, et évitait de loin tout objet dont il aurait pu entrer en contact. Ça… ça grouille dans les parois ? Oh non, il n’aimait pas ça. Il n’aimait pas ça du tout. C’était peut-être des insectes en train de grailler les murs, les rendant plus fins, presque cassant, et peut-être allaient-ils s’écraser autour d’eux. Il commençait déjà à avoir peur. Il n’était pas la plus courageuse des personnes, même s’il ne l’assumait pas, et la mort et la douleur étaient toujours des choses qu’il chassait de sa vie. Perdu dans ses pensées, il mit du temps à reprendre contact avec la réalité. « non, j’ai pas vu » souffla-t-il, quelque peu apeuré. C’était peut-être la fin de leurs aventures. C’était peut-être une bonne chose, quand il y pensait. Ils n’avaient vécu que des merdes. Mais le sommeil éternel n’était pas ce qu’il recherchait, loin de là. Il avait toute la vie encore devant lui ! mais s’il pouvait crever en même temps que l’autre, ça lui ferait les pieds.

Puis, c’était sûrement la chose à laquelle il s’attendait le moins, un tapis se mit à danser sous leurs yeux ébahis. Il resta stoïque, partagé entre l’envie de rire et l’envie de fuir. C’était quelque chose d’original, de… jamais vu auparavant, enfin… lui n’avait jamais observé cette scène. Il fit quelques pas vers le tapis pour s’approcher de lui, l’observant sous toutes les coutures alors qu’il continuait de se déhancher… saurait il parler ? « hey… tapis ? ça va ? » oui, il lui demandait si ça allait, parce que pour faire cela il fallait soit avoir un grain soit… soit y être forcé. Peut-être y avait-il une menace supérieur qui l’avait obligé à faire cette chorégraphie… peut-être devait-il en faire de même et bouger ses pattes en rythme. Mais le tapis s’arrêta pour les observer… il paraissait comme… agacé, déçu. Il ne parla cependant pas, s’enroula presque sur lui-même avant de marcher sur ses deux de ses extrémités. Il passa entre eux, sans rien mimer, sans rien prononcer. « il a l’air triste, tu crois qu’on doit le consoler ? » chuchota-t-il à la renarde, inquiet pour leur nouvelle connaissance. Ils n’avaient pas dansé avec lui, était-ce pour cela qu’il se retrouvait ainsi si penaud ? il alla rejoindre à grandes empattées, et le tapis continuait d’avancer. « hey, tapis ! eum… tu voulais qu’on danse avec toi ? » demanda-t-il, ne sachant pas quoi faire d’autre. Il ne savait pas comment l’objet allait lui répondre. Il se déroula alors, un peu plus en confiance peut-être, et … hocha la tête ? si tête semblait-il y avoir. Se Yun se tourna alors vers sa comparse. « il veut qu’on danse avec lui, peut-être il nous montrera le chemin après ? » Il vit le tapis hocher plus rapidement encore de sa tête inexistante, et le renard lui fit un grand sourire avant de claquer du pompon et de démarrer une musique… C’était ‘Abracadabra’, de Brown Eyed Girl… il ne savait pas s’il allait assumer ça, mais il se mit à danser quand même en rythme.

C’était quoi leur problème avec la danse à la fin ? Okay ! Donc résumons : ils se trouvaient dans un univers parallèle où ils avaient une quête à accomplir avec des paliers de niveaux différents pour récupérer leurs queues afin d’avoir le level suffisant pour affronter le Big Boss finalement ? Et à chaque niveau où presque, il y avait un test de danse ? Si c’était ça, au pire, ils pouvaient pas juste boucler l’intégralité du jeu Just Dance et on en parlait plus ? Eh ben, non ! Maintenant, il valait suivre un tapis magique dans sa chorégraphie. La renarde inspira l’air, essayant d’activer tous ses capteurs sensoriels pour y déceler une éventuelle trace de particules ayant des effets secondaires sur le cerveau. Quoique… Si tel avait été le cas, Se Yun aurait été imprégné, puisque dénué de cerveau.

Danser avec un tapis magique, c’était une chose. Mais… Pourquoi cette chorégraphie là ? Le véritable challenge de cette aventure était-il de ne pas mourir de honte ? Puisque son camarade se prêtait au jeu, la renarde n’eut guère d’autre choix que de se dresser sur ses pattes arrières pour commencer à effectuer le mouvement de balancier du bassin en rythme. Foutu connard d’Empereur de Jade soit loué, si forme animale lui permettait de sauver un peu de sa dignité. Surtout au moment, où elle se laissa glisser sensuelle sur le sol telle une catin la croupe en arrière. Jamais ! Ô grand jamais elle ne se serait abaissée de la sorte sous sa forme humaine ! (Ne jamais dire jamais, trop nombreux étaient déjà ceux qui avaient compris à quel point il était facile de la piéger pour l’inciter à faire tout et n’importe quoi…) On lui paierait un jour pour tout ça ! Elle ne savait pas encore qui, ni comment mais toutes les humiliations et les infamies qu’ils avaient dû traverser seront un jour venger !

Cette saloperie de tapis satisfait, il se mit à virevolter autour des deux renards avant de voler en direction de la continuité de la grotte s’enfonçant sous la terre. Il lui fit signe de lui suivre. Ils finirent par arrivée dans une immense cavité où l’eau du lac souterrain se reflétait sur les parois où de sable. Bon là, fallait arrêter le délire. Un lac souterrain au milieu du désert dans une grotte uniquement constituée de sable.
« Bon, Tapis ! »
Prête à tempérer, elle s’interrompit.
« Au fait, c’est quoi ton nom ? »
Le tapis sembla essayer de faire des signes pour expliquer la réponse. Face au scepticisme de ses interlocuteurs, il opta alors pour le langage des cheerleaders formant chaque lettre :
« B… E… R… N… A… Bernard ? Tu es Bernard  Tapis ? »
Bon, ok, soit ! S’il était content comme ça, tant mieux pour lui.
« Alors, Bernard ! C’est quoi l’arnaque ici ? »
La renarde commença à se diriger vers une des parois.
« Ne touche à rien, Malheureuse ! » se fit de nouveau entendre la mystérieuse voix.
Prompte à écouter – à sa façon, disons –, Hera effectua un mouvement de ses quatre queues, usant d’un peu de pouvoir pour créer un courant d’air et ainsi vers tomber le sable décoratif qui recouvrait une partie des parois rocheuses et même des poudres métalliques.
« J’ai pas touché, feint-elle l’innocence.

« AH LA PUTE ! Elle nous a bien niqué ! 
– Mais ta gueule ! Ils vont nous griller ! » s’éleva une seconde fois.
Comme elle s’en doutait, tout ceci devenait de plus en plus suspicieux. La renarde fusilla Bernard le Tapis pour qu’il leur révèle le pot-aux-roses. Celui-ci sembla nerveux, cherchant du secours auprès de Se Yun, du moins, s’il avait eu un regard pour le lui exprimer. Puis, il se résigna à obtempérer. Il conduit les renards à un passage « secret » qui menait à un couloir de sable, roche et métal, tel une mine souterraine au bout duquel, ils débouchèrent sur une forme de régie où équipés de micros et écran de vidéo surveillance, deux scorpions se chamaillaient à moitié :
« Ils sont où ? Ils sont où ? »
L’un des deux scorpions se retourna et essaya de faire comprendre à son copain qu’il devrait en faire de même :
« Mec, je crois qu’ils sont juste là… »

Ils avaient complété la danse, et Se Yun s’avoua qu’il avait trouvé ça plutôt amusant. Ça avait été simple, ça leur avait permis de se détendre un peu et de se défouler aussi, loin des péripéties rocambolesques qui leur étaient arrivées un peu avant. Certes, ce n’était sûrement pas la chose la plus commune que de se voir offrir un cours de Zumba par un tapis qui semblait animé d’une force qui venait d’au-dessus, mais rien n’était commun ce jour-là, il s’y était vite adapté. Ils suivirent le tapis qui s’élançait dans les airs pour les mener plus loin encore. Il observait les décors, tachant de ne toucher à rien. Il explosa de rire lorsque le tapis leur informa de son nom (il sembla vexé suite à ça, il en était désolé), et observa avec attention la scène qui se déroula sous ses yeux. Il voyait Hera détruire un peu le décor tout autour d’eux, et il fut surpris de, cette fois-ci, entendre deux voix tout autour d’eux. Il fronça ses sourcils, sceptique. C’était étrange, c’était douteux. Il regarda la renarde qui semblait être en colère contre le tapis qui le regardait lui. Il haussa ses sourcils, ainsi que ses petites épaules animales à l’objet décoratif. La colère de Hera ne lui était pas destiné, il n’allait pas se mettre en travers de son chemin. Il laissa l’autre se débrouiller avec la merde dans laquelle il les avait entraînés. Enfin, le tapis les guida jusqu’à un petit passage qui les menèrent vers une salle très différente du reste de l’ambiance, où deux scorpions y logeaient.

Se Yun les observa, ne comprenant pas trop ce qui était en train de se passer. « ouais, et donc, vous faites quoi là ? » il demanda, tout simplement, espérant avoir une réponse honnête plutôt que quelques mensonges qui finiraient vite par être découverts. Les deux scorpions se regardèrent, mais aucun ne laissa échapper le moindre son. Puis, enfin, l’un deux s’anima, et se leva. « non mais c’est vous, qu’est-ce que vous faîtes là ! » Et en plus, ils se faisaient engueuler ! Se Yun n’appréciait vraiment pas ça, et se mit à grogner, mécontent, ayant bien envie de croquer dans la créature pour la faire taire. Et, malgré le fait que son copain scorpion tentait de le calmer, le premier continuait à petit à petit s’énerver. « bah oui ! c’est pas votre place ici, genre, vous deviez chercher la laaaampe ! la laaaaaaaaaampe vous comprenez ? il nous faut la lampe pour… » Il fut coupé dans sa phrase par l’autre scorpion qui posa une de ses pinces sur la bouche du premier pour le faire taire. Puis, ce dernier poursuivit d’une voix mielleuse, un peu trop charmante au goût du renard. « pour nous éclairer, bien évidemment ouhouhouh » Il rit d’une façon un peu bourgeoise, et leur sourit (si tant est qu’un scorpion puisse effectivement sourire), puis, fit quelques signes de ses pinces pour les envoyer balader. « allez, zou, allez me chercher cette lampe ! on vous guide » Le protagoniste se demanda alors pourquoi les scorpions n’y allaient pas eux-mêmes, puisqu’ils semblaient connaître le chemin, mais avant qu’il ne puisse totalement plonger dans ses pensées, il fut coupé. « et toi, le couillus ! t’y touche pas à la lampe hein, conseil d’ami » Il allait se gêner.

Ils sortirent alors de la régie, le mâle un peu outré. « genre, ils se permettent tous ces deux-là ! » Il secoua sa tête, faisant virevolter ses petites oreilles, du sable en sortit encore. Il avança un peu, traînant des pattes, lorsqu’une voix raisonna. « hey, traînez pas on a pas que ça à faire, allez tout droit ! » Il en avait marre de ces scorpions malpolis, quand ils trouveront cette satané lampe, il allait leur faire bouffer.

Face à ses deux lascars bien désobligeants, Hera fut fortement tentée d’échanger un regard complice avec Se Yun se mettre d’accord s’ils les laminaient tout de suite ou maintenant ? Cependant, elle ne le fit pas parce que… non, mais c’était Se Yun, quoi, pas besoin de plus d’argumentation. Bon et les deux autres là, ils se foutaient pas un peu de leur gueule avec leur histoire de lampe là ? Pour « s’éclairer », hein ? Et elle, elle l’aide les grands-mères à traverser dans la rue, c’est ça ? Bah, voyons ! Enfin, bref ! Tout ceci lui courrait déjà bien assez sur le haricot pour qu’elle n’ait pas envie de débattre avec eux, et les snobant royalement, elle prit le chemin de nouveau indiqué par le tapis.

Sauf que bon…. Okay, elle n’avait pas réagi avant mais ils ne valaient pas qu’ils prennent trop la confiance non plus les deux scorpions, là ! Lorsqu’ils les pressèrent avec insolence, la réponse de Hera fut sans appel : elle s’arrêta et s’assit dignement en plein milieu du chemin.
« Mais qu’est-ce qu’elle fout ? »
Elle se contenta de tourner légèrement la tête et en levant le musant. Personne ne lui donnait d’ordre !
« Oh p*tain ! La chieuse ! »
Des bourdonnements et un fracas se fit entendre. D’agacement, un des scorpions avait perdu l’équilibre de sa chaise.
« Azy, Bro ! Lâche le papillon ! Lâche le papillon, j’t’dis ! Elle va arrêter de nous faire chier ! »
Et la douce petite créature aux battements d’ailes enchanteurs apparut dans la grotte. Autour de la renarde petit papillon virevolta. Charmant ses yeux hypnotisés, et tel le joueur de flûte, au gré de son vol. elle le suivit.

Au fur et à mesure de leur avancée, les ailes du petit papillon semblaient gagner en grandeur et en splendeur. Délicate mélodie parvint jusqu’aux oreilles de la renarde. Quelques notes sur un piano, était-elle seule à pouvoir les entendre ?

Et enfin, au bout de leur chemin se révéla l’immense cavité au centre de laquelle trônait une lampe à huile tout en haut de son promontoire de pierre et de sable. Pour atteindre les marches qui menaient l’objet de leur quête, il fallait marcher sur l’eau. Toujours captivée, envoutée, Hera ne sembla même pas le remarquer. Elle s’y avança et la magie opéra. Mais les notes du piano se fit alors entendre de plus bel, et dans une autre direction, dans son halo de lumière, il apparut : le Scorpion pianiste.
« Waaaaah ! Mais qu’est-ce qu’il fout là celui-ci là ? »
Hera n’entendit rien des protestations résonnant dans l’alcôve sinistre et enchanteur à la fois. Le papillon lui-même avait dévié de sa trajectoire, oscillant, virevoltant, hésitant entre la lampe et le musicien. Il jouait du piano debout, ça ne signifie peut-être rien pour eux, mais pour elle, ça veut dire beaucoup.
« Non, pas par-là ! La lampe, on a dit la lampe ! Pas le pianiste, bordel la Lampe! »
Malheureusement, l’envoûtement de la musique semblait avoir pris le pas sur celui des ailes de l’insecte.
« Oh ! Le couillu ! Fais quelque chose, bouge ton derche ! Rattrape ta copine, là ! »
Ouais, parce qu’avec tout ça, ils avaient un peu oublier de surveiller le deuxième renard qui était loin d’être un féru de la discipline.
« Non, va pas chercher la lampe ! Non… OH ! P*TAIN LE PAPILLON ! CHOPPE LE PAPILLON ! FAUT PAS QU’IL TOUCHE LA LAMPE ! »
Hagard et égaré, le petit être s’en était retourné tournoyer autour de la fameuse lampe. Se poserait-il dessus ? Se Yun parviendrait-il à éviter ce drame ? Essayerait-il seulement ?
« ET TOI NON PLUS, HEIN ! »
Le sort de la situation semblait être entre ses pattes…

Soudainement, et il ne sut absolument pas pourquoi, il ne comprit plus rien à la scène qui se déroulait sous ses yeux. Il y avait Hera qui ne bougeait plus et qui d’un coup s’était mise à suivre un papillon. A un moment, il avait vu la renarde flotter sur l’eau comme si tout était normal, puis un scorpion arriva de nulle part accompagné d’un piano. Se Yun, un peu à l’écart de tout cela, essayait de capter un peu le sens de toute cette cacophonie, mais il n’y arrivait pas. Puis, alors que sa comparse semblait hypnotisée par le pianiste (qu’est-ce qu’il foutait la ?), il y avait les deux autres qui gueulaient dans il ne savait pas trop quoi pour essayer d’arrêter le vol du papillon (qui semblait avoir été envoyé par eux), et de convaincre l’idiote de s’intéresser à la lampe et non à la nouvelle créature. Cela ne semblait pas marcher, puisqu’ils s’adressèrent ensuite à lui. « non mais, non ? moi je m’attaque plus à elle hein, j’ai retenu ma leçon regardez ce qu’elle m’a fait » dit-il, montrant alors tous ses attributs masculins récemment acquis. Oui, il avait bien appris que qui se frotte à la gumiho se retrouve avec pleins de couilles, et il se demandait bien comment il allait faire pour baiser quand il en aurait 9… (il était bête, mais il doutait quand même de se faire 9 femmes (ou hommes, il n’était pas difficile) en même temps). Bon. Que devait-il faire ? Papillon, Hera, Lampe, il y avait trop d’information, et il ne savait plus à quels verbes les relier. Devait-il rattraper la lampe et toucher Hera ? ou toucher le papillon et chopper Hera ? Il était totalement perdu, et ne savait pas s’il devait leur demander, ou simplement faire quelque chose.

Il s’assit alors pour contempler la situation, et bien réfléchir à ce qu’il allait faire alors que les deux zigotos continuaient de hurler dans ses oreilles pour le faire se bouger. « mais qu’est ce qu’il fait ? il est encore plus con que je le pensais celui-là ! pourquoi il bouge pas ?? » il ne les écoutait que d’une oreille, un peu distrait par ses propres pensées. Bon. Il allait laisser la renarde tranquille, elle se débrouillait, elle n’était qu’une femme, mais aussi assez grande pour savoir ce qu’elle fait (et si elle se foutait dans la merde, ça l’arrangeait). Ensuite : papillon ou lampe. Il voyait le papillon s’approcher dangereusement de la dite lampe, et les cris des scorpions se faisaient de plus en plus aigus et paniqué. Bon, et bien, il fallait chopper le papillon apparemment. Il s’élança alors vers l’insecte volant, courant sur ses petites pattes dans l’espoir de l’attraper à temps, et ouvrit grand sa gueule, et avala tout rond l’insecte. Il secoua un peu la tête (il avait failli passer par le mauvais tuyau), et regarda fièrement en l’air pour entendre un : « mais qu’il est con celui-là » Il fronça les sourcils, et, d’un coup (c’était sûrement dû à sa maladresse) perdit l’équilibre et… et vint cogner dans la lampe alors qu’il tombait de sa hauteur pour atterrir dans l’eau, suivit de près par cette satané lampe qu’il avait, au final, touché. Et… et il ne se passa absolument rien. Il s’était attendu à ce que les murs tombent, à ce que tout s’écroule autour d’eux, mais rien. Il attrapa alors la lampe entre ses pattes, et se mit à la frotter. Un génie en sortit.

Enveloppée dans une bulle envoûtante, les yeux de Hera ne semblaient plus voir que lui : le scorpion pianiste. Pas à pas, ses coussinets effleurant la surface de l’eau, elle se rapprochait de lui et… Soudain, le mirage disparut tandis que la mâchoire de Se Yun claqua, se refermant sur le pauvre papillon innocent. Surprise dans sa torpeur, la renarde cligna de paupières, incrédule quant à cette brusque disparition. Pas le temps de réorganiser, ses pensées : un plouf résonna dans la caverne.
« Plouf ? » répéta-t-elle septique, se demandant à elle-même si elle avait bien entendu.
Sa tête se tourna vers le promontoire central au pied duquel se dessinait des sillons à la surface de l’eau. Lorsqu’elle découvrit Se Yun avec la lampe entre les pattes, ses yeux s’écarquillèrent, horrifiée. Elle s’attendit au pire mais… Il ne se passa rien ? Moment de flottement, entre le soulagement et la déception. Puis, elle s’avança dans la direction de son comparse qui se mit à frotter la lampe sous les voix hébétés des deux scorpions en régie :
« C’est quoi ce bordel ? Pourquoi il peut toucher la lampe lui ? AZY, t’es sûr ce qu’était écrit sur la notice, toi ? » engueula-t-il son partenaire.
« Eh ! Je t’ai prévenu que mon chinois était encore très approximatif ! Il avait qu’à faire une lampe Made in Korea, quoi ! »
Un vacarme et un crissement strident se fit entendre à travers toute la grotte tandis que vraisemblablement les deux scorpions se battaient désormais. Abattant une patte sur ses oreilles pour essayer de les préserver de ce son trop aigüe, Hera ne la tendit que trop tard en direction de Se Yun pour lui faire signe de cesser de la frotter ainsi. Ils semblaient déjà avoir été chanceux qu’aucune catastrophe ne suive de son contact avec l’objet, peut-être ne devraient-ils pas trop provoquer le mauvais sort. Pourtant, là encore, seul un génie en sortit. Un génie au visage fort sympathique ressemblant fortement au :
« Pâtissier ? » s’étonna-t-elle à haute voix.
« Bonjour mes chers renards, je suis le génie de la Tarte. »
Un regard en direction de Se Yun qui en disait long : c’est quoi encore cette connerie ?
« Pour une tarte achetée, trois voeux vous sont offerts ! »
Parce que maintenant, même les génies demandent à être payer ?
« Et avec quoi peut-on vous acheter une tarte ? »
Il sourit en bon commerçant :
« Oh, trois fois rien ! Il faut se satisfaire des choses simples dans la vie : un coeur pur et de l’eau fraiche. »
La renarde déglutit. Pourquoi elle n’aimait pas du tout son sourire tout d’un coup. Elle murmura à l’oreille de Se Yun :
« Encore un qui est ravagé… »
Puis de sa patte, elle fit gicler quelques gouttes d’eau :
« Tenez ! De l’eau fraîche vous en avez à foison ! Quant au coeur pur… »
Elle poussa un peu Se Yun de l’épaule pour qu’il s’avance.
« T’as bien pu toucher la lampe, alors, hein, pourquoi pas ! »
Sauf que vraisemblablement, le génie ne sembla pas y trouver satisfaction et n’accorda sa tarte aux souhaits qu’en échange du dépôt du coeur de la Gumiho, subsistant heureusement grâce à son orbe – bien que diminué par l’absence encore de cinq de ses queues naturelles – qui lui serait remis lorsqu’ils auraient mené à bien leur quête ultime. Certains la caractérisant déjà de sans coeur n’y verront sans doute aucune différence…