Au premier abord, In Ha a un caractère plutôt sociable et avenant. C'est une personne qui a souvent le sourire aux lèvres, joyeuse et amusante. Vous voyez, c'est un peu le genre de mec qui fait et à qui il arrive des choses improbables, comme par exemple se réveiller en charmante compagnie et découvrir, en se faisant jeter dehors par la fenêtre en simple boxer, que c'était la fille du directeur de son lycée, directeur qui l'a bien entendu dans son collimateur depuis des années ! Ou encore, rester coincer sur le toit de l'université, après que la porte ait claquée derrière lui et être obligé de gesticuler comme un dingue pour attirer l'attention de quelqu'un aux fenêtres d'en face, pour finalement se cramponner à un arbre tout proche pour tester son agilité de singe, sans doute oubliée. Une fois, il avait trouvé un cochon d'inde dans la rue en allant en cours, oui oui un bébé cochon d'inde certainement abandonné et n'importe qui l'aurait ramené à la maison ou l'aurait laissé sur le trottoir. Non, le coréen l'a embarqué dans les bras et ayant un sac trop petit, il l'a planqué dans son chapeau pendant toute la durée des cours de la matinée. Enfin, jusqu'à ce que la petite bête ne finisse par quémander à manger, en poussant un cri strident sous les oreilles du prof d'anglais ! Décalé mais attachant.

In Ha est à part, à la fois amical et solitaire. Sa curiosité est débordante, mais seulement dans les sujets qui l’intéressent, notamment l'art, la nourriture, les voyages... Et les femmes. Il a perdu très jeune sa mère qui aurait dû être son premier modèle féminin, alors il se rattrape aujourd'hui. Il admire, les peint de ses yeux sans détourner le regard avec cette assurance étrange et naturelle qu'il dégage. Si quelqu'un lui plaît, du point de vue physique, amical ou artistique, il sera franc et direct, même si il vous croise pour la première fois dans la rue. Il apprend, note les détails, et essaye d'y mettre des mots, peut-être qu'une chanson en naîtra un jour. Romantique ? Peut-être, mais surtout, pour lui, derrière tout chanteur se cache des femmes car il faut bien l'avouer, de nos jours on écrit souvent sur l'amour et le sexe opposé. Alors il les fréquente le plus possible, connaissant parfaitement leurs redoutables atouts et leurs courbes tentatrices, même si il apprécie d'en redécouvrir chacune de leurs différences, mais pour leurs esprits et leurs pensées, il avait encore bien du chemin à faire ! Rockeur aux conquêtes d'un soir oui, amour désemparé lui enivrant le ventre de papillon, pour le moment, seule la musique lui procurait cette savourante sensation. Il en est passionné, toujours en quête de nouvelles sonorités, de groupes inconnus, d'arrangements improbables, de solos à vous faire oublier de respirer, tellement vous êtes en suspens, accroché avec ferveur à chacune des notes. Cette passion à la fois, le rapproche des gens, et à la fois, l'en éloigne. Il la partage avec eux, avec sa voix mais s'en sert aussi pour faire taire les leurs, pour s'isoler dans les mauvais moments.

In Ha surveille souvent l'heure, car il sait exactement quand les risques de crises sont les plus importants. Il semble tête en l'air, mais en réalité il est toujours en état d'alerte, anxieux, se méfiant d'un rassemblement qui pourrait se former soudainement. L'heure des repas, l'heure de la fin des cours (et je ne vous parle pas des concerts), ces moments où les gens se réunissent et se dispersent, ces groupes tous plus nombreux qu'il doit affronter chaque jour, jouant dans l'accélération de ses pas pour les dépasser et les fuir. De ce fait, il est connu pour arriver en retard le matin, et pour sortir tard le soir. Il fait comme si de rien n'était, distrayant les autres sur autre chose, les laissant étonnés de ses manies qui lui donnent ce trait excentrique à sa personnalité. Il paraît parfois insensé, il joue les insensés, comme cela, personne ne creuse plus loin sur ses étranges changements lorsqu'il est trop entouré. Peu de personnes savent pour sa phobie, c'est une chose qu'il garde pour lui mais qui est parfois assez difficile à cacher. On croit qu'il a des migraines, qu'il est lunatique ou tout simplement fou quand il s'accroupit au sol pour essayer de se calmer, ou quand il quitte les lieux en courant, sans demander son reste. On dira de lui qu'il est bizarre, mais qu'en général tout le monde l'apprécie pour son dynamisme et sa bonne humeur. Ceux qui connaissent sa faiblesse sont pour lui digne de confiance. Ce qu'il déteste ? Qu'on s’apitoie sur son sort, qu'on crie à l'aide pour lui, qu'on ameute encore plus de monde autour de lui... Fier, très fier le In Ha, même si cela ne se voit pas au premier coup d'oeil. Attention il peut mal réagir, se montrer froid ou violent mais ce n'est pas vraiment volontaire. Non, si il a besoin de votre aide, il vous le dira. Laissez-le venir, quand il s'agit de sa phobie, il est sauvage, n'aimant pas que ses crises soient trop remarquées ou attirent l'attention. Soyez juste là, près de lui, votre présence l'aidera temporairement à se calmer. Il fait ça seul, il a l'habitude, les crises sont variables, relativement maîtrisées, mais elles n'en restent pas moins toujours présentes et parfois inattendues.

Il craint terriblement sa phobie, il ressent toujours cette peur qui accentue son étouffement. Il aurait pu se renfermer et détester les gens, et pourtant, il continue à les affronter comme il le peut, son énergie à toute épreuve. Il tente, échoue, avance à petit pas lors de ses concerts, mais en ressort épuisé mentalement et physiquement. Il a l'impression que son corps le rabaisse, et c'est pour lui un sentiment insupportable... Avec les années, il a fini par faire avec. Depuis la mort de son frère qui avait réussi à calmer son trouble, le mal est revenu et ne semble pas vouloir le quitter de si tôt. C'est quelqu'un qui n'aime pas s'appuyer sur quelqu'un, la dernière personne sur qui il s'était appuyée n'est désormais plus de ce monde, par sa faute... Pourtant, on ne peut pas tout garder pour soi, surtout à ceux qui nous côtoient tous les jours ou depuis des années. Ceux à qui il s'est confié sont des personnes précieuses, à qui il s'est ouvert. Ils savent sa plus grande faiblesse et l'acceptent comme il est, et pour cela, il fera tout pour eux. Il les choie, les protège comme il le peut, même si il peut se montrer agaçant dans sa joie de vivre, mais les vrais amis, c'est à la vie, à la mort, les poings en avant et croyez-moi, quand il s'agit de protéger quelqu'un, il n'est pas le dernier à frapper ! Ses amis sont comme une véritable famille.

Extraverti, le coréen est vif d'esprit, intelligent, et a un visage particulièrement expressif, qui fait souvent de lui un livre ouvert. Un livre ouvert qui change d'expressions en quelques secondes, qui fonce tête baissée, têtu et déterminé. Il aime qu'on lui présente des gens, des gens fous, des gens rêveurs, des passionnés comme lui. Dans sa tête, il est toujours un peu un enfant, un enfant qui a perdu son modèle masculin à dix-huit ans et qui n'est pas encore sûr de vouloir atteindre sa maturité. Il est un peu insouciant à voir comme cela, mais il connaît bien les souffrances de la vie et malgré le fait qu'il semble planer, et s'agiter dans tous les sens, nous donnant l'impression qu'il ne reste que dans sa bulle, il fait attention à ceux qui l'entourent. Il se renferme seulement au cours de ses crises, une armure de piquants aiguisés l'entourant de toute part, et après plusieurs longues minutes, le bouclier tombera et il fera comme si rien ne s'était passé.

Huit ans.

"Tu cours, tu cours sans savoir où tu vas. Tu te laisses porter par la peur, elle te guide à travers les ruelles de la capitale, te domine. Tu fuis, tes bras suivant le rythme effréné de tes petites jambes qui cognent le sol silencieux. Ton souffle s'emballe, tu ne le contôles pas, tu n'y fais pas attention. Il t'entoure dans un nuage brumeux, le froid colore tes joues d'une couleur pâle. Les pas brutaux se rapprochent de toi, tu les entends, tu les entends toujours, même si tu accélères ta course qui brûle tes poumons. Ils crient ton nom, te menacent, ce qui confirme dans ton esprit que tu n'arrêteras jamais de courir. Tu ne sais pas d'où te vient cette force. Tu ne te rends même pas compte que tu as atteint une grande avenue, tes pas se mélangent à d'autres, pourtant tu ne cries pas. Tu ne demandes pas d'aide, ta voix s'est étouffée, elle ne sort pas, tu ne fais presque pas attention aux gens. Tu les frôles, les évites, tel des obstacles inanimés. Pourtant, tu finis par te figer sur place, ravalant ta respiration haletante, tes yeux se portant tout autour de toi, à la recherche des hommes en noir qui te poursuivaient. Tu les cherches, tu attends de les entendre à nouveau, de voir leurs regards sombres se posaient sur toi, ces regards meurtriers. Tu as bien compris ce qu'ils te feraient si ils t'attrapaient. La peur ne cesse d'empoigner ton coeur, alors que tu tournes sur toi-même, emporté par le mouvement de la foule dans laquelle tu t'es perdu. Des géants, ce sont tous des géants. Ils ne te voient pas, t'écrasent dans leurs démarches ininterrompus, froides, robotiques. Ton regard crie à l'aide. « Sauvez-moi » Personne ne te prête attention, tout tourne autour de toi, l'air s'emballe dans tes poumons, te brûle, ta gorge se serre peu à peu... Pourquoi... Qu'est-ce qui se passe ? Tes mains se plaquent sur ton torse, réveillant la douleur de tes poignets légèrement entaillés. Les cordes étaient serrés, mais pas assez. Tu tombes à genoux, un gémissement sort de ta bouche. Tu lèves les yeux vers le ciel étoilé, ils sont tous de plus en plus grands, de plus en plus loin de toi. Tes yeux se ferment, tu te recroquevilles sur toi-même. L'espace se réduit, ton souffle s'y mêle, tu n'as plus la force de courir, ton coeur étouffe. Noir."

A l'âge de huit ans, In Ha a été enlevé par des malfrats qui voulaient obtenir une rançon de son père, PDG d'une grande chaîne de centres commerciaux. Mais avant d'avoir atteint leur but, le jeune garçon avait réussi à s'enfuir, se déliant lui-même de ses liens. Un couple avait récupéré l'enfant dans la rue, inconscient, avant de le confier à la police un peu plus tard. Malheureusement, cet événement a ancré en lui un traumatisme : pendant sa fuite, l'enfant a développé une crise de panique en plein milieu de la foule, un des symptômes de l'agoraphobie. Marqué depuis ce jour, In Ha a dû mal à parler devant un certain nombre de personnes et a resté trop longtemps au coeur d'une foule importante. Seul son frère aîné s'était rendu compte de ce problème, il l'aida à canaliser ses crises en restant à ses côtés, veillant sur lui avec attention. Personne d'autres n'était au courant, ni leur père bien trop occupé, ni leur mère, décédée d'une maladie foudroyante l'année des six ans de leur jeune soeur, Ha Na. Il n'y avait que lui. Voulant avant-tout le déstresser de cette phobie qui tétanisait le plus jeune de quatre ans son cadet, Joon-Ha décida de l'initier à la musique, suggérant soudainement à son père de lui payer des cours. L'enfant se mit alors au chant, au solfège, s’intéressant à la guitare et plus particulièrement à la basse, trouvant un soudain réconfort dans quelque chose qui commençait doucement à le passionner. Mais la peur ne voulait pas partir. Une chaise vide en plein concert, la sienne, au dernier moment, il fuyait toujours, prétextant qu'il n'aimait pas jouer en public. Seul son frère connaissait la vérité, lisait à travers ses mensonges que l'on prenait simplement pour un signe de rébellion, de nonchalance permanente. Non, ce n'est pas qu'il ne le voulait pas, il ne pouvait pas. Alors qu'il se reposait sur Joon-Ha, celui-ci se préparait déjà pour devenir un futur successeur pour son père. Il était fait pour cela, intelligent, mature, calme, charismatique, tout le monde était certain qu'il deviendrait un digne héritier. Pendant ce temps-là, In Ha s'occupait de sa soeur, se montrant tantôt protecteur, tantôt possessif, veillant exagérément sur elle depuis la mort de leur mère. La seule fille, leur petit trésor. Avec les années, les crises diminuèrent. L'adolescent se focalisait sur son aîné, parmi la masse de regards posés sur lui, s'accrochant au lien invisible qui le reliait à lui. Il est là, il sera toujours là, voilà ce que lui transmettait son sourire à quelques mètres de lui. In Ha inspire, expire, faisant taire son pouls qui s'emballe. Les cordes se tendent sous ses doigts, sa voix s'échappe, et tout semble s'apaiser.

•

Dix-huit ans.

« Allo ? Allo ? Vous êtes le frère d'In Ha ?! Oui ?! Il y a un problème, il faut que vous veniez, il s'est effondré en pleine rue ! Je ne sais pas ce qu'il a, il veut rien me dire ! Vous devez venir, dépêchez-vous !»

[...]

« Un important accident a ralenti la circulation de Hongdae vers 16h cet après-midi. On déplore un blessé. Un homme aurait percuté un piéton, alors que le feu était au rouge pour ce dernier. Le piéton est dans un état grave. » Son frère décéda à l'âge de vingt-deux ans. Il avait appris qu'In Ha avait une crise, une crise soudaine et intense, il courrait à travers le quartier pour le rejoindre le plus rapidement possible, après l'appel apeuré d'un de ses amis. Une seconde crise foudroya le jeune musicien quand il apprît cette atroce et irréaliste nouvelle... C'était sa faute... Il avait voulu sortir plus tard, il n'avait pas vu l'heure, les gens sont arrivés, il n'avait pas pu les éviter... Il en avait voulu un bref instant à son ami qui avait appelé son frère à l'aide alors qu'il le suppliait de ne pas le faire, mais vous me direz, c'était un vrai ami. C'était sa faute à lui, et rien qu'à lui...

•

Vingt ans.

« IN HA ! » Un crissement de sol se fît entendre alors que le garçon en question courrait à travers le dernier étage du centre commercial de son père. Dépassant les bureaux à vive allure, son doigt appuyait frénétiquement sur le bouton de l'ascenseur et en faisait de même pour le refermer. Une main s'interposa aussitôt entre les portes et il s'écarta d'un bond en voyant l'homme aux cheveux poivre et sel entrer, suivi de son secrétaire personnel. La porte se referma, alors qu'In Ha s'agitait dans tous les sens, se planquant derrière le troisième homme par habitude. « Quand est-ce que tu apprendras ? Pourquoi tu me fais honte comme ça ?! C'était qu'une présentation que tu devais faire pour donner tes idées pour la prochaine publicité du groupe ! » A ses mots, celui-ci l'attrapa par les oreilles et les lui tira comme à un gosse, lui arrachant justement une plainte des plus comiques. « Ahhhhh Abeoji ! Je vous avais dit que je ne voulais pas le faire ! » Le secrétaire brandissait sa sacoche devant la caméra de l'ascenseur pour que personne ne filme la scène ridicule qui se jouait à ce moment précis. L'ascenseur était toujours le lieu de règlement de compte pour la famille Yoon, là où personne ne pouvait les entendre. Le père relâcha son fils alors que les étages diminuaient rapidement, il ne faudrait pas que n'importe qui ne les aperçoivent comme cela. « C'est fini, c'est fini ! » s'exclamait le musicien, remettant son costume à moitié débraillé en place alors que l'aîné le fusillait à nouveau du regard en entendant son soulagement. L'étudiant sortit tranquillement, marchant d'une démarche assurée comme si il n'avait plus rien à craindre désormais à la vue de tous, mais c'était sans compter sur le PDG qui lui asséna un coup dans le dos qui le déstabilisa devant l'entrée principale. Il lâcha un cri de douleur, se retournant avec vigueur vers le bourreau qui le dévisageait. « Rentre ! On parlera de ça plus tard. » In Ha pesta, se redressant soudainement comme si on lui avait piqué les fesses, en s'apercevant que tout le monde les regardait et traversa le hall, jusqu'à l'extérieur, le menton bien levé. Un soupir s'échappa de ses lèvres en s'arrêtant quelques mètres plus loin, après avoir passé la porte. Encore un échec. Et dire qu'il y avait passé la nuit, il s'était cassé la tête pour trouver des idées originales, puis il avait fait des graphiques pour détailler son projet. Il avait tout bien fait... Tant pis, il fera comme d'habitude, il le laissera sur le bureau du secrétaire, au moins il était sûr de ne pas recroiser son père. Tout d'un coup, quelqu'un lui agrippa le bras et il avait bien failli courir à toute vitesse en croyant que c'était l'heure du second round, avant de reconnaître sa soeur, qui l'observait en silence, les sourcils froncés. Elle savait déjà tout. « Ne t'inquiètes pas, Mr Kim transmettra tes idées à Abeoji. Tu peux être fier de toi, t'as bien bossé ! » Il n'était pas vraiment convaincu, mais bon, alors qu'elle rajoutait qu'un jour il y arriverait, In Ha lui souriait simplement, la rassurant, se rassurant lui-même par la même occasion, même si l'efficacité était minime. Mais pour elle, il le fallait. Je vais bien, tu n'as pas besoin de t'inquiéter autant, lui assurait son sourire. Tu ne dois pas t'inquiéter, je ne veux pas que tu me viennes en aide, et que je te perde toi aussi. Il ne reprendrait jamais ce risque. De toute façon, il n'était pas l'héritier idéal, et il ne le serait jamais. Il savait qu'il le décevait mais il ne voulait pas lui avouer pour sa phobie, de peur qu'il ne regrette encore plus Joon-Ha en tant que successeur, qui était mort à cause de lui... Ses pensées négatives le quittèrent peu à peu, alors qu'il resserrait son bras contre celui de la jeune fille pour l'entraîner manger quelque chose d'appétissant.

•

Vingt-deux ans.

« In Ha ? In Ha, il te faut combien de temps ? » Un homme aux cheveux décolorés était assis sur le bord de la scène en coulisses, ses mains posées de part et d'autre de sa tête penchée vers l'avant, les yeux fermés, le souffle irrégulier. Au loin, des applaudissements, des cris, quémandant le rappel tant attendu. Combien de temps était déjà passé ? Cinq minutes, dix minutes, davantage ? Il ne savait plus. Il se taisait, les trois autres membres non loin de lui, pourtant habitués à cette situation, ne pouvaient cacher leur nervosité. Ils savaient que cela finissait toujours par lui passer, ils savaient que ses mains étaient parcourues de tremblements au bout d'un moment sur scène et que la présence du guitariste et du bassiste plus près de lui le détendait pour quelques minutes de plus et seulement quelques minutes. Il avait toujours besoin d'une pause pour se remettre, son état était différent de celui d'un chanteur normal quand il avait fini une performance. Sa tête lui tournait, sa vue devenait floue, sa respiration était alarmante, jouant sur ses cordes vocales et la justesse de ses notes. Parfois, ils éliminaient une ou deux chansons du programme car il ne pouvait plus tenir. Au début, il s'écroulait en coulisses, ne pouvant même pas atteindre une chaise pour s'y appuyer dessus. Les autres craignaient pour sa santé, mais il était têtu, et avec le temps, sa condition s'améliora. Il s'isolait un instant, sa respiration haletante couverte par l'agitation extérieure du public. Patience... Nichant un cachet blanc dans sa bouche, l'homme releva lentement la tête, un sourire impatient aux lèvres. « C'est reparti. » Il leur fît signe et tout le monde entra à nouveau sur scène, sous de nouvelles acclamations. Un violent battement venait de frapper sa poitrine, comme à chaque fois qu'il remettait un pied ici. Il sentait peu à peu sa peur se mélanger à l'adrénaline, la crainte se mélanger au plaisir et à l'excitation. Il agrippa le micro, plus fermement qu'il n'aurait dû le faire, et les projecteurs se rallumèrent.