Donne-moi le temps d’apprendre, d’essayer. Je n’ai jamais connu ça auparavant, ces émotions nouvelles qui me dévorent l’esprit, qui ne me quittent plus. Cette obsession douce qui nait au creux de mon ventre, ces papillons qui me vont vriller la tête. C’est une douce torture, violente parfois car elle devient ingérable. Je suis passé d’un oubli à un tout. Une piqûre de rappel qui m’a fait mal, bien plus que je ne l’aurais pensé. Finalement j’ai compris, que quelque part je n’avais jamais su tourner la page sur notre histoire. Je ne pensais pas que ça serait aussi brutal, encore plus déroutant… et aujourd’hui, je me retrouve perdu face à cette montagne de sentiments. Je n’ai pas fait les choses à moitié cette fois, Ye Won devient mon tout. Encore une fois, j’ai laissé parler ma colère pour faire revenir la douceur. Une tempête intérieure qui me fait perdre la tête. Mais avec elle dehors je n’y pense plus. Je veux simplement que cet instant soit gravé dans ma mémoire. Elle finit par regarder le ciel à son tour et j’ai l’impression d’y voir les lueurs des étoiles dans ses yeux. Cet instant est différent, plus intense encore. La lune est pleine, si belle et si lumineuse… tout comme elle. J’ai l’impression de me perdre un peu plus. J’en oublierais ces mots de trop, ceux qui blessent et finissent par avoir raison de nous. C’est peut-être là notre force aussi, savoir pardonner à l’autre… mais c’est arrogant de ma part. Je ne peux imaginer qu’elle puisse passer au-dessus aussi vite. Je regrette chacun de mes mots, chacun de mes gestes. Je me laisse finalement aller, retrouvant la chaleur de son corps contre mon bras. Tout se fige, plus rien n’existe à part ces jolies lumières au-dessus de nous. A force de se combattre on en oublierait l’essentiel… oui, c’est vrai j’en oublierais presque à quel point elle compte pour moi. Ces nuits passés loin d’elle, cet accident… j’aurais pu la perdre ce soir-là et même cette crainte à disparue au profit de cette rancœur mal placée. A quoi bon lutter contre quelque chose d’inévitable… je suis né pour l’aimer… cette fille est mon tout, mon monde. Sans elle je ne suis rien…  et je suis un idiot, toujours reclus dans ma peur. Je suis effrayé à l’idée qu’elle me repousse, qu’elle ne partage pas ces sentiments démesurés. Rien qu’un souvenir dans son esprit, une ancienne marque dont elle a du mal à se détacher. Le temps semble s’être arrêté, nerveux je me tourne vers elle. « Je… » suis désolé. Mais je ne parviens pas à lui dire. Une angoisse monte en moi, mes yeux rivés dans les siens, je ne sais pas ce que je dois faire. Mes doigts remontent jusqu’à ses cheveux. Je joue nerveusement avec une de ses mèches « T’es si belle… » Beaucoup trop pour moi et mon cœur qui tambourine. C’est un murmure, presque une confession que je lui fais. Je succombe Ye Won… je n’arrive pas à te laisser. Je ne peux pas t’imaginer avec un autre homme que moi. Je veux t’appartenir, même si tu veux jouer avec mon cœur alors je l’accepterais. Mais ne me laisse pas… et sans m’en rendre compte, j’approche mon visage du sien. Je me laisse avoir, juste une seconde dans ce temps désormais figé. 

Un spectacle resplendissant, qu’on voit peu de fois dans sa vie. Les lumières de la nuit qui offre un nouveau réconfort, différent. Qui laisse peu à peu la peur s’échapper. Qui montre l’immensité du monde sous un nouveau jour. Subtilement, tu te laisses bercer par cette vue, tu t’y perds, différemment. Il n’en fallait pas plus pour que cette pointe de lucidité revienne. Encore une fois, il a su comprendre ce dont tu avais besoin pour te calmer, lentement mais sûrement. Tu desserres tes mains peu à peu, sans pour autant briser ce contact, toujours aussi nécessaire. Tout semble changé, démesuré. Autant le nombre d’étoiles dans le ciel que ces sentiments qui reprennent place en toi. Cet amour qui vous uni, qui vous brise à la fois. Ces vérités cachées que vous n’osez pas vous dire. Le bruit des branches arrête lentement de t’effrayer, disparait au fur et à mesure des secondes qui passent. Ton coeur lui, continue de tambouriner dans ta poitrine, alors que la brise amène à toi l’odeur si particulière d’Il Kyang. Celle que t’aurais aimé sentir à nouveau sur ta peau. Celle qui te rassure le plus, qui te ferait succomber une nouvelle fois. Tes spasmes se font plus rares, ta respiration plus lente. Finalement, tu arrives à mieux gérer cette crise, alors que tout te revient en mémoire. Cette dispute élancée dans le ciel avant cette coupure. La douceur dont il a su faire preuve pour te rassurer. Et tu comprends que rien n’a de sens. Même ce spectacle offert sur un plateau. Au bout de quelques longues minutes à observer ces éclats de lumière, ton regard fini par se poser sur lui, comme une évidence. Et tu ne sais plus quoi faire. Tout se mélange en toi. La beauté de l’instant mêlée à la douleur de ces paroles prononcées plus tôt. Comme prise au piège, alors que tout ce que tu désires, c’est lui. Depuis toujours, sans répit. Et malgré ce que tu as pu lui dire, il est le centre de ton monde. T’aurais donné ton âme au diable pour lui, pour le savoir heureux, libre. Tu serais prête à succomber, face à ses lèvres qui t’interpellent, face à ce regard posé sur toi que tu aurais oublié. T’aimerais pouvoir te laisser aller à ce bonheur exquis, retrouver le confort de ses bras, les douces palpitations de ton coeur lorsqu’il est contre toi. « Il Kyang je… » je t’aime, attend moi, ne me laisse plus sans toi. Quelques mots suspendus. Une nouvelle vérité qui explose en plein coeur. Vos lèvres prêtes à se sceller, et pourtant. A quelques millimètres de la délivrance, une nouvelle panique te prend, tout aussi violente. D’un seul geste, tu te recules, relâche tes mains qui tombent le long de ton corps. Ton regard devient triste, désabusé. « Je … je peux pas … » souffles-tu, baissant la tête. Un courage certain dont tu t’étonnerais presque. Pourtant, les blessures réapparaissent. Le visage de cette autre fille, ces bruits perdus dans la nuit. « J’peux pas être un second choix. Pas… pas comme ça… » Ta voix se brise, au rythme de tes mots. A cet instant, tu aurais voulu que rien de tout ça ne se soit passé. Que rien ne se soit mis sur votre chemin. Et tu voudrais fuir, mais tes jambes refusent de répondre. Tu restes simplement plantée là, une nouvelle larme glissant sur ta joue. Pourquoi est-ce si difficile d’aimer, de pardonner. Pourquoi ces douleurs sont plus vives encore. Fut un temps ou tu ne pensais plus le retrouver, ou tu le savais, au fond de toi, dans d’autres bras. Et t’avais su y faire face. Pourtant, ces retrouvailles avaient changé la donne. Et maintenant, tu ferais tout pour revenir en arrière, pour éviter d’en être arrivée là.

J’y succombe, peu importe le reste… cette fois je ne me débattrais pas. On peut tout oublier si on le désire vraiment. Il suffit d’un geste, de quelques millimètres entre nous. Je peux sentir son souffle se coupé, avec les mêmes doutes que le mien et si on se laisse aller une nouvelle fois c’est pour notre bien. Arrêtons tous ces mensonges, ces non-dits qui nous éparpillent. Je veux être elle, mon cœur veut battre à l’unisson. Il palpite si fort dans ma poitrine, je n’ai plus le courage de reculer. Je reste suspendu à ses lèvres, cette façon qu’elle a de prononcé mon nom m’électrise toujours. J’aime l’entendre sortir de sa bouche, comme un droit qu’elle seule pourrait avoir. Je veux retrouver la tendresse de ses baisers. Sentir ses bras m’enrouler, mieux cette fois, sans ce plâtre qui nous gênait. J’ai besoin de retrouver tout ça… il n’y a plus rien… que nous deux… et cette crainte qui gâche tout. Elle recule brusquement, s’interdit de céder. Non ! Je ne veux pas Ye Won, reste avec moi je t’en supplie. Oublie tes doutes, je saurais te rassurer. Fais-moi confiance bon sang ! Mais rien, ses idées la brouillent, l’empêche d’avancer vers moi. Et cette phrase, ces mots, qui n’ont aucun sens à mes yeux. Un second choix… jamais, pas une seule fois elle ne m’est apparue comme deuxième dans mon cœur. Je suis perdu, mes yeux la regardent cherchant des réponses, abasourdi et tristes. Ne me fais pas ça Ye Won, je t’aime trop pour qu’une fois de plus tu t’éloignes. Je n’y arrive pas sans toi, ne vois-tu pas tous ces efforts que j’ai fait ? J’ai pris sur moi, malgré ma peur j’arrive à aller vers toi. Mais tout ça n’a aucun sens tant que ces mots ne sont pas prononcés. Alors je m’approche d’elle, prêt à la supplier d’abandonner ces idées noires. Prêt à lui demander une nouvelle fois pardon. Mais une lumière éclaire subitement son visage perdu. Je cligne des yeux, presque éblouis alors que deux phares nous piègent. Une voiture… celle de nos amis qui s’arrêtent devant la maison. Pris au dépourvu, j’aimerais avoir le temps de lui parler. De lui dire qu’elle se trompe. « Ye Won, attends… » Une vaine tentative avant qu’ils ne sortent de la voiture et s’exclament « Hey ! Vous aussi vous êtes coincés dans le noir ? » Jae se marre, moi je n’ai plus le cœur à rire. Je veux qu’elle reste, alors je tente de la retenir, mais ma main glisse déjà sur le tissu de son pull, alors qu’une silhouette familière monte les marches. Tous avec leurs portables à la main, ils éclairent le chemin vers la porte. Et je vois se dessiner Katarina… cette fille que je n’aurais jamais cru revoir. Un regard paniqué en direction de Ye Won « C’est… » Pas ce que tu crois. Ce n’est pas moi qui l’aie invité. Pris au piège dans mon propre mensonge, je serre la mâchoire alors qu’ils rentrent dans le chalet. Kitae débarque rapidement sur la terrasse, content surement de nous retrouver « C’était drôle  la soirée vous auriez dût venir. On s’est tous retrouvés plongé dans le noir. » Nous aussi… et on était bien avant qu’ils n’arrivent. Je me tourne vers Ye Won, qui me fuit déjà. Je suis désemparé, c’est trop tard une fois de plus. « C’est général ils disent. » entendre la voix de Min m’agace. Alors je tique ma langue contre mon palais et entre à nouveau à l’intérieur. J’y retrouve rapidement Jae, cette fois-ci contrarié. Je profite du fait qu’il soit isolé pour aller lui parler. « Qu-est-ce que tu fous ? Pourquoi tu l’as encore ramené ? ça suffit pas la merde que t’as foutu ? » Il me regarde, baisse la lumière de son téléphone vers le bas « Je suis désolé… j’aurais dût leur dire mais je me sentais con. » Je soupir, de toute façon ça ne changera rien n’est-ce pas ? Elle ne me croira plus jamais… « Envoie-toi en l’air ailleurs putain ! » et je pars, finalement énervé par cette interruption. Je ne prends le temps de parler à personne, même à Kitae et part directement dans ma chambre. Cette fois, je veux être seul, oublié cette soirée pourrie. Je me sens si mal, je jette ma casquette, lâche un râle de désespoir et retombe sur mon lit. Je meurs d’envie ce soir-là de lui envoyer un message. Je reste des minutes devant mon écran, à écrire, effacer ces quelques lignes. Et le courage finit par me manquer… parce-que je suis persuadé qu’elle ne me croit plus.  

La tentation est là, omniprésente. Celle de retrouver ses bras, de sentir à nouveau ton corps contre le sien. Mais les doutes reviennent, persistent. Les mensonges, les non-dits ont raison de toi, cette fois. Tu ne peux plus jouer à ça. Tu ne peux plus être faible face à lui. Pas après tout ça. Ce qui s’est passé la nuit dernière n’est que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Ce qui t’empêche désormais de succomber au pêché. Ton regard se perd sur le sol enneigé, alors que tu sens ton coeur battre un peu plus fort dans ta poitrine. Ta respiration qui se coupe, un instant, alors que toi même, tu n’arrives pas à croire ce qu’il se passe sur cette terrasse. Tu recules à mesure qu’il se rapproche de toi. Un revers, une boule dans le ventre qui pourrait te tordre de douleur. Vient les voix de vos amis, arrivant non loin de vous. Tes yeux se tournent vers eux, vers elle. Il ne t’avait pas menti quand il t’a dit qu’elle allait venir. Alors c’est ça ? Il joue sur les deux tableaux, en voyant lequel restera le plus longtemps ? Il joue une nouvelle fois. Une grimace qui déforme tes traits, alors que tu le regardes, une forme d’incompréhension et de tristesse qui s’en dégage. Comment peut-il faire ça ? Comment peut-il encore tenter de te rattraper après ça ? Tu gardes le peu de contenance qu’il te reste, déglutis avant de te tourner vers les autres. « Vous m’racontez demain ? J’allais m’coucher. Bonne nuit. » lances-tu en leur direction, comme si rien ne s’était passé. Pourtant, te voilà une nouvelle fois le coeur en miettes. Cette douleur dans ta poitrine au fur et à mesure des battements de ton coeur. Et tu t’en vas, part t’enfermer à clé dans ta chambre. Sans un mot, sans un geste de plus. Seule face à l’obscurité qui te terrifie. Et tu restes là, assise dans un coin de la pièce. Jambes repliées sur toi, la tête tournée vers la fenêtre. Tu peux encore y voir des étoiles. Mais cette fois, des larmes viennent de plus belle capturer ton visage. Des minutes, des heures à attendre dans le noir. Le chaos autour de toi, le bruit de la vie qui suit son cours dans les pièces d’à côté. Et même lorsque le silence reprend place dans le chalet, tu n’arrives pas à trouver le sommeil. Il te faudra attendre un moment encore, avant d’oser sortir de ta chambre, retrouver le canapé du salon. Ta main glisse sur le briquet qu’Il Kyang t’avais donné, un peu plus tôt. D’un geste, tu laisses cette flamme s’illuminer, ton regard figé dessus. Le temps semble s’être arrêté, pour te laisser seule face à ces événements illogiques. Tu mets du temps, à te laisser tomber en arrière, éteignant cette lumière, retournant faire face à la nuit. Ton corps fatigué de tous ces émois fini par sombrer, tes yeux se ferment enfin pour trouver ce sommeil que tu peines à rencontrer. Mais le jour se lève bien vite. Quelques heures tout au plus à pouvoir te reposer, si cela est réellement possible. Les premiers rayons de soleil qui viennent caresser ta peau, te réveillant sur un nouveau jour. Le dernier de l’année, ce jour tant attendu, signe de festivités. Pourtant, à peine ouvres-tu les yeux que tes doutes s’installent de plus belle. Tu n’es pas sûre de pouvoir avoir le coeur à la fête, pourtant, tu te lèves bien vite, un vertige qui te prend. A bout de forces, autant physiquement que mentalement. Pourtant, t’as besoin d’une bouffée d’air frais. Alors, tu vas récupérer tes cigarettes, en silence, t’installe en terrasse pour observer un nouveau spectacle. Seule, cette fois. Sans personne pour te déranger. Un levé de soleil à observer de ces yeux teintés de tristesse. Une fumée de nicotine qui parfois écorche le décor, te laisse un goût amer. Dix, vingt minutes, à rester là, avant que le froid n’ait raison de toi, t’obligeant à rentrer. D’un geste las, tu te décides à te préparer un café. Une tasse devant toi que tu ne fais que remuer, encore et encore, jusqu’à ce que les garçons ne se lèvent, un par un, et te retrouvent dans la cuisine. Ils sont si souriants, de bon matin. T’aimerais être comme eux, retrouver ce que vous étiez, bien avant tout ça. Kitae t’offre l’un de ces sourires rassurants. « T’es déjà levée et tu m’as même pas fait de café ? J’suis presque déçu. » lance-t-il à ton égard, t’arrachant un rictus pourtant si fade. Min Young le suit de près, tout aussi joyeux. Il semblerait qu’il passe déjà à autre chose, t’offres un baiser sur le front comme un geste oublié depuis longtemps. C’est lui qui se met en cuisine, préparant des assiettes pour tout le monde. Des oeufs, du bacon. De quoi remplir cinq estomacs, sans rien demander en échange. « Bien dormi sinon ? » « J’ai jamais eu une nuit aussi reposante ! » Ils se charrient, échangent ces banalités d’un naturel si déconcertant. Min Young dépose enfin une assiette devant toi, un sourire gêné sur les lèvres. « Tiens, faut que tu manges, j’parie que t’as encore rien avalé hier soir et t’as besoin de forces. » T’aurais envie de lui dire, que tu n’as pas faim, que ton estomac reste noué. Mais il n’en est rien. Après avoir joué avec ton café, voilà que désormais, tu t’amuses à bouger les aliments dans ton assiette à l’aide d’une paire de baguettes…

Allongé sur mon lit, le regard rivé à l’extérieur, je ne trouve pas le sommeil. Mon cœur s’alourdit, au fil des minutes sous le poids des souvenirs. Une image, la sienne, qui tourne sans cesse à m’en faire perdre toute notion du temps. Je ne sais pas depuis combien de temps je suis parti me coucher, je me sens épuisé et pourtant je n’arrive à rien. J’ai beau fermer les yeux, je la revois, son regard hésitant vers moi. Par-dessus tout c’est la déception que j’ai pu y lire qui m’a blessé. La même que celle que mes parents avaient à mon égard. Une fois de plus j’ai tout raté, elle disait vrai, je fou en l’air tout ce que je touche… j’ai beau essayé de me rattraper je n’y arrive plus. Je tourne, encore une fois, fixe mon regard sur un point, soupir… ce jeu ne cesse pas, alors je finis par me lever. D’un pas léger, discret je sors de ma chambre. Dans le couloir, je prends la direction de la sienne, fixé devant sa porte, j’attends… un courage qui ne viendra pas. Le destin se joue de moi, de mes erreurs… ma paume posée contre le bois, j’aimerais pouvoir y entrer, lui dire que je suis désolé. J’aimerais qu’elle m’écoute, qu’elle me croit aussi… décourager, je retiens un soupir fait demi-tour et vais me chercher un verre d’eau à la cuisine. Sur mon chemin, je croise une silhouette endormie dans le salon… c’est elle… mon cœur se serre, mes pas habitués à la retrouver se rendent déjà au canapé. Tout près d’elle, j’entends son souffle délicat, il est tôt, je ne sais pas depuis combien de temps elle est là mais parce-que je suis barge je me baisse, pose mes bras sur le dossier. Je l’observe, la lumière de dehors me laisse apercevoir ses traits fins et paisibles. J’espère soudainement que dans ses rêves elle est heureuse, plus qu’elle ne l’est en me retrouvant. D’un geste fin, je laisse mes doigts parcourir ses cheveux. Je prends un risque, mais c’est plus fort que moi. J’ai besoin d’être auprès d’elle, de la toucher… comme quelqu’un qui perd la tête, je profite d’une occasion volée. Je reste de longues minutes ici, à la contempler, à essayer d’apaiser mon cœur… je finis par la laisser, tout aussi triste je regagne ma chambre et m’endors si peu de temps… C’est la lumière de dehors qui me réveille encore une fois. J’ai à peine dormis et je me sens réellement épuisé ce matin. Mais je n’ai plus envie de rester enfermé. Alors je me lève, passe une main vigoureuse sur mon visage et grimace de douleur en frottant mon œil. Je n’y pensais plus, presque seule trace de ma discorde avec Min. Je ne sais plus quoi penser à son sujet… et c’est la tête vidée que je sors de là pour aller à la cuisine. Une fois de plus les autres sont levés avant moi. J’y trouve Kitae, Min et… Ye Won. Comme toujours, il est là, à se pencher vers elle, prendre soin d’elle… je ne sais pas depuis combien de temps Ye Won n’a pas manger. En réalité, elle a l’air épuisée, sa mine tirée… je n’ose pas me faire remarquer. Je me glisse presque discret sur un tabouret alors que Kitae s’écrie « Ah Il Kyang t’as… oh ! Une sale tête. » Il ne s’attendait pas à me voir dans cet état non plus. Il prend un air soucieux, tandis que mes yeux se posent sur Min. J’aimerais m’excuser auprès de lui, mais le voir aussi proche de Ye Won m’arrache le cœur. Alors je serre les dents, tandis que mon meilleur ami me présente une assiette. Elle me donnerait faim en temps normal, mais je ne suis pas certains. « C’est Min qui a tout préparé. » une approche pour que je passe à autre chose n’est-ce pas ? Kitae est malin, moi trop rancunier pour ça. Alors je pousse d’un revers de ma main l’assiette « J’ai pas faim. » puis me lève pour prendre un simple café. Bien noir, corsé pour me réveiller. Je ne reste pas avec eux, alors que leur complicité m’écorche le cœur. 

La nuit a été bien trop courte, tu manques cruellement de sommeil pourtant, tu n’arrives pas à dormir, te reposer correctement. Toutes ces images continuent inlassablement de tourner dans ton esprit, tentant d’y trouver une certaine logique. Mais tout est trop contradictoire, à tel point que tu ne sais plus quoi penser. La déception reste là, bien ancrée en toi, même au réveil. Et si la journée d’hier a été une réelle catastrophe, t’espères au fond de toi que ça ira mieux, aujourd’hui. T’as besoin de t’accrocher à ça pour tenir, un tant soit peu. Un soupire, alors que Min dépose une assiette devant toi. Un simple « merci », discret, qui s’échappe d’entre tes lèvres, alors que ton regard se pose sur Il Kyang, juste en face de toi. Tu ne saurais dire ce qu’il se dégage de ses yeux, mais il a l’air fatigué, lui aussi. Tes lèvres se pincent à cette idée, parce que malgré tout ça, il y a cette part de toi qui se soucie de lui, aussi. Qui espère qu’au fond de toi, qu'il va bien. Mais tout sonne terriblement faux. Absolument tout. Alors tu reportes ton attention sur ton assiette, l’air de rien. Tu essaies de manger, une, puis deux bouchées. Tout a un goût si fade. Tout ça te tord l’estomac. Encore plus lorsque tu vois Il Kyang fuir. Il prend ta place, quelque part, alors que tu restes là, perdue dans tes pensées. Sans réellement faire attention à ce qu’il se passe autour de toi. Jae est le dernier à se lever, vous retrouver dans la cuisine. Lui est bien heureux de trouver de quoi manger aussi rapidement, et s’empresse de s’installer sur l’un des tabourets. « Waaah un matin royal ! T’as géré Min ! » lance-t-il, un sourire aux lèvres. Les garçons ont l’air d’avoir oublié, un tant soit peu, tout ce qu’il s’est passé la veille. Ca te rassure quelque part, parce que tu n’es pas venue pour leur faire subir tout ça. « On va sur les pistes ce matin ? » demande déjà Kitae, une question qui t’arraches un sourire triste. Vous n’êtes pas venus pour traîner uniquement dans ce chalet, et même si tu n’as envie de rien, t’es prête à faire un effort, au moins le temps de quelques heures. « J’suis partante. » finis-tu par répondre, après les autres. Tu ne sais plus quoi faire pour arrêter de penser à Il Kyang, à cette fille, à tout ce qui vous déchire. Tu bois quelques gorgées de ce café froid, difficilement. Quelques secondes de plus avant de t’exclamer : « Au fait, vous deviez me raconter votre soirée d’hier non ? » Faire comme si de rien n’était, ne serait-ce que quelques minutes. Entendre leurs rires pour espérer aller mieux. Il n’y a plus que ça que tu puisses faire. Et ils n’attendent pas plus longtemps pour se perdre dans les histoires de la veille, alors que toi, tu t’étais retrouvée si proche d’Il Kyang à ce moment là. Ca te donne des frissons que tu caches tant bien que mal. Quelques rires à la volée, un instant sans penser à lui. Un soupire, au bout de longues minutes de conversation. Tu les observes, te dit que t’aimerais retourner en arrière. Lorsque vous aviez dix huit ans, et que tout paraissait si simple. Tu finis par te lever, leur offrant l’un de ces sourires brisés. « J’vais m’préparer la première, j’fais vite promis. » Et tu pars récupérer quelques affaires, avant de t’enfermer dans la salle de bain. Cinq petites minutes sous une eau brûlante pour te décontracter, autant que possible. A peine le temps de t’habiller, n’osant plus te regarder dans un miroir. Pas de maquillage, pas de luxe pimpant. Une simplicité dont t’as besoin, ne serait-ce que pour aujourd’hui.

Je fuis, pars dans ma chambre et m’y renferme une nouvelle fois. Ces banalités me débectent, leur façon de faire comme si de rien n’était. Pourtant c’était moi il y a quelques jours qui jouaient à ça. Désormais, je ne supporte plus de faire semblant. J’ai envie de crier au monde entier ma colère, ma frustration d’être auprès d’elle alors que nos cœurs s’éloignent. Je bois mon café, assit sur la petite chaise de bureau, je me perds à nouveau vers cette photo abimée. Plus qu’un souvenir… je devrais avoir le courage de la jeter. M’en débarrasser pour tourner la page… mais j’ai toujours cette point d’espoir je crois. Celle qui me fait croire que c’est possible… je l’ai vu hier soir, avant qu’elle ne s’éloigne. Je ne suis pas fou, je ne peux pas imaginer toutes ces choses. Toute cette colère qu’elle a contre moi, c’est parce qu’il y a toujours quelque chose. Et peu importe ce que c’est, je refuse de perde ce lien. Même la haine m’irait, tant qu’elle ne disparait pas de ma vie. Un long soupir, avant que je ne prenne de nouvelles affaires. Quelqu’un frappe à ma porte « Ouais. » peu convaincu de vouloir discuter. Le visage de Kitae apparait « On va sur les pistes, tu viens ? » ce n’est pas vraiment une question. Je le vois dans son regard. J’hésite quelques secondes et j’abdique, je n’ai pas la force de me battre de toute façon. Alors j’esquisse un geste bref puis récupère mes vêtements pour aller à la salle de bain. Malheureusement pour moi j’y croise Ye Won qui en sort. Mon regard croise le sien, dans un instant gênant alors je m’écarte pour la laisser passer. Aussitôt je m’enferme, prends trop de temps parce-que je suis las de tout. Jae frappe plusieurs fois « Oh il Kyang grouille-toi. » mais sous l’eau, je ne l’écoute pas. J’ai mis ma musique plus forte aussi. Une façon de m’exclure dans mon monde avant d’affronter le leur. Il me faut bien plus de quarante minutes avant de pointer le bout de mon nez dehors. Jae et Kitae me regardent les bras croisés. « Tout ça pour ça. » c’est vrai, je n’ai pas fait d’efforts vestimentaires, je n’ai pas maquillé mon œil violacé et j’ai les cheveux mal coiffé. J’hausse les épaules, un sourire insolent sur les lèvres. Je ne cherche pas à les énerver, je fais juste ce que j’ai envie c’est tout. « Sale gosse ! » marmonne Kitae à mon passage. Je récupère mon manteau dans ma chambre et décide d’aller attendre les autres sur la terrasse. Enfilant ma veste, je remarque rapidement que je ne suis pas tout seul. Ye Won… et même si j’hésite quelques secondes à faire demi-tour. Je reste là… lançant subitement « Bien mangé ? » c’est une question banale pourtant pleine d’amertume. Surement parce-que je pense à Min qui est toujours là pour elle. Frustré, j’avance vers elle. La fumée de sa cigarette s’échoue sur moi, alors que je viens lui montrer mon œil « T’en penses quoi de ça ? » à quoi je joue ? Pourquoi est-ce que je viens la provoquer de cette façon ? Je pensais être lassé, mais ce matin je me sens rancunier. J’en ai ras le bol de Min et de ses sourires. Je suis certain qu’elle prend son parti plus que le mien. Est-elle content de briser une amitié ? Parce-que justement ce « ça », c’est la marque qu’une fissure s’est créer entre lui et moi. Alors j’ai envie de lui rappeler qu’avec toutes ses conneries, j’en suis arrivé là. Je crois que je suis trop fatigué, je fais n’importe quoi. J’ai un sourire narquois au coin des lèvres, comme si je me moquais de tout. 

T’essaies de te dépêcher, quelque part, t’as envie de commencer cette journée différemment. Un moyen pour toi de ne pas terminer cette année sur un véritable fiasco, certainement. C’est ce que tu te dis, alors tu te laisses aller à cette idée d’arpenter les pistes ce matin. Une dizaine de minutes, pas plus, avant de sortir de la salle de bain. Tu croise Il Kyang, baisse la tête instinctivement. Tu ne veux plus de cette guerre, ni maintenant, ni jamais. Mais tu n’es pas sûre que cela puisse être possible. Tu continues ta route jusqu’à ta chambre, range tes affaires, attrape ta veste, ton téléphone et tes cigarettes. Tu n’as pas la force de sourire, pourtant, tu fais de ton mieux pour aller de l’avant, aussi difficile que cela puisse paraître. Les autres sont dehors, toujours avec leur entrain habituel. Ils discutent de tout, de rien, laissent leurs rires s’échapper dans le ciel. Tu restes à côté d’eux, les écoute sans forcément prendre part à la conversation. Parfois une remarque te fait esquisser un sourire, alors que ton regard reste inlassablement perdu sur les montagnes face à vous. Min Young retourne finalement dans la cuisine après avoir terminé sa cigarette pour ranger tout ce qu’il a sorti. C’est à ce moment là qu’Il Kyang réapparait. T’aimerais être capable d’oublier sa présence, tout ce qu’il s’est passé aussi. Pourtant, à chaque fois qu’il est là, tu te souviens. De ces derniers jours, affreux. De tout ce que vous vous faites subir depuis que vous êtes arrivés. Tu ne dis rien, allume une nouvelle cigarette. Jae et Kitae partent à leur tour, vous laissant seul. T’as ce haut-le-coeur, une certaine peur de ce qu’il pourrait se passer. Un doute qui se confirme à sa première question, à laquelle tu réponds par un simple haussement d’épaule. T’es fatiguée, par toute cette colère qui s’accumule en toi. T’es à bout de forces, tu voudrais simplement arrêter tout ça, mais il ne semble pas de cet avis, une nouvelle fois. Alors, tu tournes la tête en sa direction. Tes traits sont tirés, des cernes bien prononcées pour souligner tes yeux, toujours remplis de tristesse. « Recommence pas, s’il te plait. » réponds-tu enfin, de cette voix cassée. T’es las de tout, n’a plus envie de rien. Tu te demandes même comment tu arrives à faire ces efforts. Mais c’est pour les autres que tu le fais. Certes, ils ont fait une erreur en vous emmenant tous les deux ici, mais ils n’ont pas besoin de tout subir. Tu t’en rends compte, quand tu vois les trois autres continuer leur chemin. Tu ne veux plus les mêler à tout ça, alors que finalement, tout ce qu’ils voulaient, c’était passer des vacances entre amis. Tu te redresses devant lui, éteignant ta cigarette, laissant échapper un dernier filet de fumée entre tes lèvres. « Ecoute, j’suis fatiguée d’tout ça. J’fais des efforts, pour eux. Alors essaie juste de faire de même, ok ? » A ces mots, tu retournes à l’intérieur, le regard rivé sur le sol, tes mains enfouies dans tes poches. Tu retournes au salon, aux côtés de Jae. Peut-être qu’en ayant une autre personne à côté de toi, il arrêtera de continuer ce petit jeu. C’est tout ce que tu espères. Lassée de tout, de ces sentiments, de cette colère qui te ronge. Epuisée par ces nuits sans repos, par ces interrogations qui continuent de tourner en boucle dans ta tête. Tu veux simplement passer à autre chose, enfin. Tourner la page sur cette histoire qui n’était vouée qu’à une fin tragique, à n’importe quel instant.

Je n’ai plus rien à lui dire. Aucune discussion banale ne peut franchir mes lèvres. Je ne sais plus comment lui parler, j’ai oublié avec ces rancœurs. Je suis lassé, plus que les autres jours et je n’ai plus la force d’essayer. Alors je parle, pour ne rien dire cette fois. Une rancune mal placée, je ne ferais aucun effort aujourd’hui. Je suis fatigué, épuisé par tout ça. Armé de mon mauvais côté, je n’ai pas envie de rire, ni de sourire. Aujourd’hui, on me prendra comme tel et rien de plus. Je l’écoute, c’est elle qui arrive à faire ce pas vers moi. On arrête tout ça ? Si elle veut, je m’en fous. J’hausse les épaules, lui jette un regard sans émotion. Je suis vidé, cette fois pour de vrai. Je la regarde s’éloigner, plus rien n’a de saveurs. Je ne trouve plus ce paysage si beau tout compte fait. Il m’oppresse et il me tarde de retrouver mon quotidien. J’ai envie d’être dans les rues de Séoul, me perdre dans des ruelles, écouter les autres, les observer. Imaginer une vie que je n’ai pas, qui m’inspirait. J’en suis arrivé là, à détester ce trop de liberté. Je ne peux plus en profiter pleinement. J’entre de nouveau à l’intérieur, pour un court instant, jette un regard rapide en direction de Ye Won et Jae. Rien en tête, des images floues, je sors déjà, descends les marches et les attends. Je crois que je suis ivre de fatigue. Aussi bien physique que morale. Sur mon téléphone, je cherche des musiques que j’aime, celles qui me sortiront de cette nonchalance peut-être. Kitae arrive, enthousiaste il me saute dessus. « T’écoute quoi ? » je relève les yeux vers lui, lui montre mon téléphone et avance déjà pour prendre le chemin des pistes. Il me suit de près, rebondissant sur mon choix de chanson. Il parle, j’écoute, j’acquiesce, sans polémiquer. Il me connait ainsi, il sait comment je fonctionne. Ce problème m’a trop rongé. Alors j’en viens à être blasé. C’est plus facile ainsi, pas de sentiments, pas de frustration… je prends les choses comme elles viennent et ça me va. Arrivé à la station, ce même rituel entre nous. On récupère nos équipements Kitae propose qu’on reste sur les mêmes pistes. J’accepte sans broncher, je m’en fiche. Tant qu’on ski c’est le plus important. J’ai besoin d’air dans cet espace qui se rétrécit autour de moi. Je marche devant, trouve une place dans la file et écoute les autres parler. « On a eu le droit à un pass pour boisson à volonté à la boîte d’hier soir. » dit Kitae, tout fier de nous montrer son sésame. J’observe, plisse les yeux alors que Jae renchérit « On a mis tellement l’ambiance qu’ils nous l’ont offert. Kitae a même chanté. C’était n’importe quoi. » Je pensais qu’ils avaient fini de raconter leur soirée… « On pourra y retourner demain soir si ça vous dit. Tous ensembles. » Son regard de pose sur moi et j’imagine Ye Won aussi. Je lâche un petit ok, avant de détourner les yeux. « Quant à ce soir. Vous vous rappelez, on va à la grosse soirée organisée. Faut bien s’habiller. Ils vont même élire une reine et un roi. » Kitae rit « C’est moi qui vais gagner » Jae en est persuadé. J’hésite à lui demander si il a invité sa pouffe, mais je ne le fais pas. Je me force à sourire, pas la tête encore à faire la fête. Peut-être que ce soir ça viendra. La fatigue m’aidera à me lâcher. 

Tu n’as plus envie de rien. Qu’importe l’endroit ou tu peux te trouver, qu’importe les personnes avec toi. Tu te sens simplement vidée, de toute émotion. Les autres se dépêchent de se préparer, et vous vous mettez enfin en route pour retrouver les pistes. Un passage à la boutique pour récupérer vos skis, tu restes un peu à l’écart. A l’inverse du premier jour, tu fais attention à tes gestes, tes mots. Min Young reste à côté de toi, avec Jae, alors que Il Kyang et Kitae restent tous les deux. C’est peut-être mieux comme ça, tu ne sais pas. Tu prends une grande inspiration au moment de monter sur les pistes, écoute les autres. Une soirée, ce n’est peut-être pas la meilleure des idées, mais t’accepte. Tu sais que vous êtes attendus ce soir aussi, mais tu doutes avoir le coeur à ça. Faudrait-il encore que la journée passe sans accroche. Tu feras tout ce qui est en ton pouvoir pour, en tout cas. Ton regard qui se pose parfois sur Il Kyang, qui te fait encore douter. Ces idées que tu tentes d’oublier, mais qui restent là. « Toi en roi Jae ? J’ai un doute. » lances-tu, une envie certaine de retrouver ce sourire qui manque à ton coeur. Tu ne veux plus souffrir, et peut-être qu’en attendant ce retour à Séoul, le seul moyen d’y parvenir, reste de profiter, du mieux possible, de ces instants avec tes amis. Aussi difficile que cela puisse paraître. Arrivés en haut, les garçons décident de faire la course, une nouvelle fois. Tu leur souris, alors que tu sais que tu dois faire attention à toi. « Ca sera sans moi les gars, mais j’vous suit de près. » assures-tu, déjà prête à t’élancer. Il n’en faut pas plus pour que vous glissiez sur la neige, comme des ados qui oublient leurs problèmes. Tu restes à bonne distance, laisse tes démons derrière toi. C’est tout ce dont t’as besoin à cet instant. Une descente, une seconde, puis une troisième. Un moment, une voix t’interpelle, te surprend. Haruto est en haut des pistes, lui aussi. Un sourire gêné se dessine sur tes lèvres, sans réellement savoir quoi faire. « Ca fait plaisir de te revoir. » s’exclame-t-il déjà, sans que tu ne saches quoi répondre. « Je te présente mes amis. » ajoute-t-il, montrant du bras trois autres personnes. Un signe de la main que tu leur offre, sans savoir quoi penser. « Enchantée. » réponds-tu brièvement, déjà sur le point de partir. « Mes amis sont un peu plus loin, on doit faire une course, mais on se recroise plus tard ? » Tu tentes de rester polie, ne voudrait pas déclencher une nouvelle guerre dans ton groupe d’amis. Mais Haruto, qui semble bien heureux de retomber sur toi, ne s’avoue pas vaincu si facilement. « Je peux vous suivre ? Au moins pour cette descente ? » « D’accord. » avoues-tu vaincue, ton regard rempli de nervosité, caché sous tes lunettes. Haruto te suit, alors que tu retrouves les garçons. Tu pars la première, sans attendre, trichant un peu finalement. Tu restes concentrée sur tes gestes, sans forcément vouloir être la plus rapide. Pourtant, il ne faut qu’un gamin pour couper ta route, te faisant perdre l’équilibre. Une chute, violente, sur les côtes. Un cri de douleur que tu n’arrives pas à retenir, alors que ton corps encore faible suite à l’accident continue de te faire mal. T’aurais envie de maudire ce gosse qui n’en fait qu’à sa tête, mais tu n’arrives pas à bouger. Ton souffle qui se coupe un instant, alors que la moindre inspiration devient insupportable. Allongée sur le sol, tu n’oses plus bouger, ton visage crispé, une nouvelle peur qui s’installe en toi, encore et encore.